Spontanément, on n’aurait pas imaginé Philippe Claudel en montagnard. A tort, de toute évidence, puisque l’écrivain se dit au contraire "fou de montagne", depuis que, en parfait gars de l’Est, il a passé ses premières vacances à crapahuter dans les Vosges, au Tyrol autrichien, puis à Chamonix. Dans cette passion, les lectures "montagneuses" jouèrent un rôle majeur, d’abord les romans de Heidi, qu’il évoque sans complexe, puis des classiques comme Premier de cordée de Frison-Roche, lu, relu et même, récemment, préfacé (chez Guérin en 2009), ou encore Glace, neige et roc de Gaston Rébuffat, que Claudel définit comme "un véritable manuel d’alpinisme". C’est à 16 ans que le jeune Philippe a effectué sa première grimpée, non loin du mont Blanc. C’est à Chamonix qu’une fois il s’est guéri d’une sorte de dépression, et c’est jusque dans les Andes péruviennes que l’a mené son désir de se dépasser soi-même, en 1982. En revanche, il n’a jamais tenté l’Himalaya. Il préfère sagement les randonnées en moyenne montagne, avec ces refuges rustiques où l’on trouve "un retrait du monde". Parfait pour un écrivain.
Sincère et profond, Claudel, qui a failli devenir guide de haute montagne, se raconte et s’oublie à la fois, interrogé par le journaliste spécialisé Fabrice Lardreau. Et à la fin, quatre textes choisis et mis en situation, de La chèvre de M. Seguin de Daudet à une randonnée à skis avec Primo Levi, contée par Mario Rigoni Stern, illustrent son imaginaire ciblé, pointu. J.-C. P.