T-shirt casual, voix douce, d'une courtoisie qui le dispute à la distinction, Florent Dabadie est très évidemment un type charmant. Ce qui, si l'on considère qu'il est le fils de Marie et de feu Jean-Loup Dabadie, n'a au fond rien de surprenant. Voilà vingt-quatre ans que ce garçon, pourtant si français par sa parentèle et son éducation, vit et travaille au Japon, après un voyage initiatique lors de sa première année d'études en langues orientales. Celui que les hasards de la vie, mêlés à ceux de la passion, ont révélé en journaliste sportif publie aujourd'hui  À revers, son premier roman, peinture inspirée des vestiaires guère reluisants du tennis contemporain, hantés par la question du dopage. C'est l'histoire de Masha, 16 ans, jeune Française originaire des pays de l'Est qui a sans doute assez de talent, mais pas assez de muscle, pour réaliser son rêve - ou celui de ses parents - : devenir une des meilleures tenniswomen du monde.

Le tennis, Florent Dabadie l'a découvert dans les travées de Roland-Garros avec son père, dont il parle avec une infinie tendresse. Il s'en est fait spécialiste ainsi que de tous les sports populaires dans son pays d'adoption. Son intérêt pour le sport lui vient sans doute de son grand-père Pierre-Étienne Guyot, qui présida un temps dans les années 1970 aux destinées du PSG. Mais pour le Japon, sa plus grande et pérenne passion, il faudrait plutôt chercher du côté ses deux grands-mères, l'une arménienne, l'autre italienne, toutes deux éprises de voyages.

Aussi le jeune homme part-il en coopération au pays du Soleil levant lorsque vient pour lui l'heure du service militaire. Là-bas, il intègre pour Hachette Filipacchi la rédaction japonaise du magazine Première, ce qui lui permet de comprendre qu'il n'est pas nécessaire de partager toutes les passions d'un père - car être cinéphile, il n'y arrive pas très bien... C'est alors qu'il rencontre Philippe Troussier qui vient d'être nommé sélectionneur de l'équipe nationale de foot. Celui-ci a besoin d'un traducteur et Florent, 24 ans, tombe à pic. L'aventure durera quatre belles années. Lorsque Troussier s'en va, il lui propose de le suivre, mais Florent Dabadie préfère rester à Tokyo. Il devient rapidement chroniqueur puis animateur d'émissions pour des télés et radios japonaises. Il y impose l'originalité d'un profil élégant et calme. Par ailleurs, il pige dans différents supports, notamment pour le groupe So Press. En janvier dernier, en vue des prochains Jeux olympiques, il est nommé correspondant permanent de L'Équipe au Japon.

Entre-temps, ses passions littéraires nées avec Tolkien se sont réveillées : Vargas Llosa d'abord et ses grands romans historiques comme La fête au bouc, mais aussi Kafka, le premier Kundera, Updike et le grand et local Natsume S?seki. Que des romanciers du réel vu à travers le prisme d'un regard singulier. Ce qu'est aussi À revers qui porte bien son titre et a quelque chose d'un chemin buissonnier qui s'ouvre.

Lorsqu'on lui demande s'il compte se rendre à Paris, il répond qu'il aimerait bien, en fonction des consignes sanitaires, mais que ce serait pour la messe de requiem donnée à l'Académie française pour son père. Dans un souffle, il conclut : « J'aimerais être là pour papa . »

Florent Dabadie
À revers
JC LATTÈS
Tirage: NC
Prix: 20 € ; 300 pages
ISBN: 9782709662444

bio

1981 Premier match au Parc des Princes à 7 ans (France-Pays-Bas). 1993 Premier séjour au Japon. 2002 Interprète de la sélection nationale du Japon lors de la Coupe du monde de football. 2012 Mariage avec sa femme japonaise, obtention de son visa perpétuel et création de sa société de production. 2020 Nommé correspondant du journal L'Équipe au Japon.

Les dernières
actualités