Adaptations audiovisuelles

Valérie Barthez (Scelf) : « Replacer l'organisme de gestion collective au cœur de notre mission »

Après sept ans à l'Association des éditeurs d'éducation, Valérie Barthez a pris la direction générale de la Scelf en 2025 - Photo Hélène Bamberger

Valérie Barthez (Scelf) : « Replacer l'organisme de gestion collective au cœur de notre mission »

Valérie Barthez a pris la direction générale de la Société civile des éditeurs de langue française (Scelf) en début d'année et partage sa vision et ses perspectives pour l'institution qui fête ses 65 ans. Elle devrait lancer un nouveau cycle de formations pour les 400 adhérents éditeurs.

J’achète l’article 1.5 €

Par Éric Dupuy
Créé le 24.09.2025 à 15h05

Juriste spécialisée en propriété intellectuelle, Valérie Barthez a pris la tête opérationnelle de la Société civile des éditeurs de langue française (Scelf) début 2025. Elle rejoint la rue Ballu (Paris, IXe) en apportant une expertise transversale du secteur éditorial et de la gestion collective. Forte d'un parcours qui l'a menée des organismes de gestion collective aux éditeurs scolaires, elle entend consolider les fondamentaux de la structure tout en développant de nouveaux axes stratégiques, notamment autour de la formation des éditeurs.

Livres Hebdo : Comment définiriez-vous la Scelf et ses missions pour ceux qui ne la connaissent pas ?

Valérie Barthez : La Scelf est une société créée en 1960 par les éditeurs de livres, qui ont souhaité se réunir pour porter une voix collective sur les sujets d'adaptation. L’objectif prioritaire était d'accompagner leurs auteurs dans la gestion des droits. 

En tant qu’organisme de gestion collective, la Scelf compte aujourd’hui plus de 400 membres. Au fil des années, portée par l’engouement collectif de ses adhérents, elle a développé d'autres missions : la promotion de l'adaptation, qui aboutit aujourd'hui à toute la partie événementielle et notamment son programme phare Shoot the book ! et la formation des éditeurs sur les sujets de cessions audiovisuelles, théâtrales et radiophoniques.

Quels sont les principaux sujets liés à la gestion collective aujourd'hui ?

La gestion collective des droits est un modèle qui est né en France. Elle est donc bien installée ; et pour les éditeurs, elle permet de sécuriser les droits et d’assurer la défense des auteurs.

« Les adaptations ont pu se développer dans un environnement maîtrisé »

La Scelf a accompagné au fil du temps les évolutions liées au droit d’auteur et à la gestion collective. Grâce à cette implication des éditeurs, les adaptations ont pu se développer dans un environnement maîtrisé. Ces adaptations sont aujourd’hui présentes dans les sélections officielles des plus grands festivals internationaux : au Festival de Cannes cette année, une dizaine de films étaient adaptés de livres, notamment La Petite Dernière d’Hafsia Herzi, adapté du livre de Fatima Daas aux éditions Noir sur Blanc (prix d’interprétation féminine), ou encore Connemara d’Alex Lutz, tiré du livre de Nicolas Mathieu aux éditions Actes Sud. Plus récemment, à la Mostra de Venise, les grands cinéastes français Valérie Donzelli, François Ozon, Cédric Jimenez, Olivier Assayas ont tous présenté des films adaptés de livres.

La Scelf participe de cette dynamique, et s’engage à soutenir tous les projets et acteurs du livre sur ces sujets. 

L'événementiel de la Scelf, notamment Shoot the Book ! connaît un développement important. Comment voyez-vous son évolution ?

C'est un développement permanent par le renouvellement. Pour Shoot the Book ! au Festival de Cannes ou à Séries Mania, Festival International de séries, nous travaillons main dans la main avec nos nombreux partenaires afin d'offrir des dispositifs toujours plus pertinents aux éditeurs et aux producteurs présents chaque année. Porté par le travail formidable d’Émeline Chetara, directrice de la programmation de la Scelf, nous explorons régulièrement de nouveaux formats et de nouveaux marchés. Nous sommes désormais présents à Londres, en Italie au MIA et à Taiwan au TCCF. L'export du livre à l'international est une priorité et notre collaboration avec l'Institut français permet aux éditeurs membres de la Scelf de découvrir des marchés porteurs pour l'adaptation dans le monde.

Il nous faut rester en permanence à l'écoute des évolutions du marché et de l'intérêt que peuvent manifester les producteurs vis-à-vis des éditeurs et des auteurs français.

Vous souhaitez développer l'offre de formation de la Scelf. Quels sont vos objectifs ?

Jusqu'à maintenant, nous avons mené des formations ponctuelles en fonction de sollicitations de nos membres. Par exemple, nous avons récemment organisé une formation sur le spectacle vivant, qui a rencontré un grand succès. La Scelf produit par ailleurs des contrats type de cessions de droits, à disposition de ses adhérents ; nous venons de finaliser celui relatif à la série, genre d’adaptation en plein essor. 

« Construire un programme complet et structuré »

L’objectif aujourd’hui est de construire un programme complet et structuré, avec l'aide du ministère de la Culture. Ces formations vont couvrir tous les aspects de l’adaptation, des questions juridiques à l’art du pitch, en passant par l’étude de critères d'adaptabilité des livres. Elles visent notamment à accompagner de plus petites structures sur ces marchés. Nous sommes d’ailleurs en discussion avec la FILL (Fédération interrégionale du livre et de la lecture) afin de permettre aux éditeurs régionaux un accès à ce dispositif.

Quelles sont vos autres ambitions pour la Scelf ?

Avec le président Philippe Robinet, le bureau et le Conseil d’administration, nous souhaitons dans un premier temps consolider notre modèle de gestion collective, cœur d’activité de la Scelf. Nous envisageons de développer des statistiques sur les adaptations, afin de poursuivre le travail mené avec le Centre national du livre ces dernières années. La dernière étude du CNL a montré que 17 % des films sont issus de l’adaptation d’un livre, et que ces adaptations génèrent en moyenne 32 % d’entrées supplémentaires par rapport aux œuvres non adaptées de livres. Nous échangeons également avec le Syndicat national de l'édition autour de cet axe statistique, car ces données sont clés pour toute la profession.

« Le rôle de la Scelf est de défendre les éditeurs et leurs auteurs »

De manière plus générale, le rapport à la lecture, et notamment celui des jeunes, est un sujet qui me tient particulièrement à cœur. Nous avons pu constater récemment que des succès en salle de livres adaptés attiraient de nouveaux publics en librairie. Nous sommes convaincus que la Scelf a un rôle à jouer afin d’accentuer ce mouvement. 

Nos actions sont toutes étroitement liées, et se renforcent mutuellement : la formation prépare les éditeurs aux enjeux de l’adaptation. Ces compétences nourrissent leur participation aux rencontres professionnelles, qui permettent le développement du marché. Enfin, la gestion des droits intervient au moment de la diffusion des œuvres adaptées. La lecture est le fil conducteur de ce cercle vertueux.

Comment voyez-vous les relations entre les différentes structures du monde du livre ?

L'interprofession du monde du livre se connaît bien et se parle en permanence. Chacun est dans son rôle et celui de la Scelf est de défendre les éditeurs et leurs auteurs, afin d’offrir les meilleures conditions possibles au développement d’adaptations sous toutes ses formes. Notre action est une pierre à l’édifice des actions interprofessionnelles, qui œuvrent toutes pour le rayonnement de la création littéraire française.

Les dernières
actualités