Il s'est montré plus précoce encore que Bret Easton Ellis à qui on l'a comparé à ses débuts. L'auteur de Moins que zéro avait 18 ans quand il écrivait son premier roman appelé à devenir culte. Nick McDonell, lui, en avait 17 lorsqu'il rédigea Douze (Denoël, 2004, repris en J'ai lu) en neuf semaines, directement à l'ordinateur. C'était l'été 2002, il avait la jambe dans le plâtre, comme il nous l'explique, dans un hôtel parisien, en précisant que le livre qui lui a donné envie de se lancer n'est autre que... Moins que zéro.

Né Robert Nicholas McDonell à New York en février 1984, ce jeune homme qui a toujours voulu écrire a grandi dans le monde de la presse et de l'édition. Sa mère, Joanie McDonell, est romancière et scénariste. Son père, Terry McDonell, est un vieux briscard de Rolling Stone, Sports Illustrated et Esquire. Enfant, le petit Nick recevait même des lettres du déjanté Hunter Thompson. Un Thompson qui, lors de leur première rencontre quand il avait 8 ans, lui a proposé d'emblée une cigarette !

D'abord friand de fantasy et de science-fiction, il découvre ensuite Moby Dick, l'oeuvre de James Salter ou de Thomas McGuane dont il est toujours capable de citer de mémoire le début de Panama. Le manuscrit de Douze, il l'a d'abord fait lire à son frère et à son père. Lequel l'a confié à Morgan Entrekin, le patron de Grove/Atlantic, qui a décidé immédiatement de l'inscrire à son catalogue.

Mélancolie et émotion. Difficile de ne pas reconnaître le talent du débutant, son don d'observation, son art du portrait. Un surdoué dont le coup d'essai au style affûté peint sans fard une jeunesse dorée new-yorkaise qui se perd dans la drogue. Douze est devenu un best-seller traduit dans vingt-trois pays et porté à l'écran par Joel Schumacher. Salué par la peu tendre Michiko Kakutani du New York Times et par Joan Didion, McDonell a su ne pas s'enfermer dans un genre, ne pas réécrire indéfiniment le même livre et s'ouvrir sur d'autres horizons. Avec Le troisième frère (Denoël, 2006, repris en J'ai lu), où réapparaît Mike, le protagoniste de Douze, il a prouvé qu'il avait de la ressource. Qu'il était aussi à l'aise pour arpenter Hongkong que New York, avec un mélange de mélancolie et d'émotion.

Studieux, l'écrivain a alors repris ses études et le chemin de Harvard. Où il a fait partie de la promotion 2006 en compagnie d'un certain Mark Zuckerberg, le créateur de Facebook. Ce qui lui a donné la matière d'un récit incisif, Guerre à Harvard (Flammarion, 2008, repris en J'ai lu). Trop long pour le New Yorker et trop court pour faire un volume selon les standards américains, le texte a emballé sa nouvelle éditrice française, Olivia de Dieuleveult, qui l'a édité en première mondiale et peut se féliciter des dix mille exemplaires vendus.

A 28 ans, McDonell continue de travailler et de progresser, d'écrire, de voyager et d'enquêter. Le revoici avec deux ouvrages à ne pas manquer. Le premier est un récit, Mission accomplie, que Dave Eggers a publié chez McSweeney's et qui le montre rejoignant en 2009 l'armée américaine sur le front irakien. Le second est un roman ambitieux, Le prix à payer, dont l'action se déroule entre Harvard et la frontière somalienne - et où l'on croise à nouveau son héros fétiche, Mick.

Nick McDonell rentre tout juste de Kaboul où il a séjourné six semaines, envoyé en reportage par Time, magazine prestigieux auquel il collabore en free-lance depuis dix ans. Après un saut à New York pour les fêtes de fin d'année, il va rejoindre l'Angleterre et Oxford afin d'y terminer ses études au St Anthony's College. Dans ses bagages, il y a un iPod - contenant notamment Voodoo de D'Angelo, des albums des Strokes et de Nina Simone, le Kind of blue de Miles Davis - et un exemplaire de Telegraph avenue, le nouveau roman de Michael Chabon, l'auteur de Wonder boys dont il raffole.

En février prochain, le jour de son vingt-neuvième anniversaire, il a la ferme intention de s'attaquer à sa prochaine fiction : un "fat novel", >à la manière de Jonathan Franzen, où il imbriquerait plusieurs histoires. Ce garçon n'a donc décidément pas fini de nous étonner et de nous impressionner.

Le prix à payer de Nick McDonell, traduit de l'américain par Jérôme Lambert, Flammarion, 21 euros, 246 pages, ISBN : 978-2-08-129020-4. Egalement chez Flammarion, Mission accomplie, traduit de l'américain par Samuel Sfez, 15 euros, 171 pages, ISBN : 978-2-08-129019-8. Sortie : 9 janvier.

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