GALLIMARD JEUNESSE

Age mûr et tête de classe

"Nous défendons cette position de maison généraliste. C'est un enjeu difficile mais d'autant plus important que la littérature pour la jeunesse participe activement à la croissance de l'édition en amenant les jeunes à la lecture." HEDWIGE PASQUET, GALLIMARD JEUNESSE - Photo OLIVIER DION

Age mûr et tête de classe

La filiale de Gallimard fondée en 1972 par Pierre Marchand, vecteur français du phénomène Harry Potter, compte parmi les acteurs majeurs du secteur jeunesse. Elle regarde vers le futur en cherchant les auteurs de demain et en investissant dans le numérique.

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Par Claude Combet,
Créé le 30.10.2014 à 11h36 ,
Mis à jour le 10.12.2014 à 12h48

Gallimard Jeunesse est une grosse machine, mais c'est une machine réactive", déclare Hedwige Pasquet. La P-DG de Gallimard Jeunesse, qui a rejoint la filiale de Gallimard en 1976, quatre ans après sa fondation par Pierre Marchand et Jean-Olivier Héron, prépare cette dernière à affronter un nouveau pan de son histoire. "La structure elle-même n'a pas changé, même si l'équipe s'est agrandie (70 personnes) et s'est spécialisée. De nombreux jeunes sont entrés notamment à l'éditorial, à la maquette et au marketing", explique Hedwige Pasquet, qui veille avec Christine Baker, directrice éditoriale, à la bonne marche de l'entreprise. La petite enfance, "Mes premières découvertes" et les premières lectures sont sous la responsabilité d'Anne de Bouchony ; les documentaires et les licences audiovisuelles sous celle de Thomas Dartige ; la littérature et la BD sont pilotées par Thierry Laroche (voir ci-contre) ; la musique est dirigée par Paule du Bouchet ; et le label Giboulées par Colline Faure-Poirée.

Le service marketing.- Photo OLIVIER DION

"Nous sommes un éditeur généraliste, avec un public très large, depuis les bébés jusqu'aux ados. Nous accompagnons l'enfant tout au long de son développement, en faisant même des incursions pour les plus âgés avec des titres comme Les royaumes du Nord et Le clan des Otori, qui ont été repris en Folio », souligne Hedwige Pasquet. La maison possède aussi son satellite, Les Grandes Personnes, dont elle assure la fabrication et la diffusion. "Nous défendons cette position de maison généraliste. C'est un enjeu difficile mais d'autant plus important que la littérature pour la jeunesse participe activement à la croissance de l'édition en amenant les jeunes à la lecture", ajoute-t-elle.

Le service fabrication.- Photo OLIVIER DION

Tout au long de ses quarante années, le développement de Gallimard Jeunesse a accompagné celui du secteur. Après la grande époque documentaire de Pierre Marchand avec "Les yeux de la découverte" et "Mes premières découvertes", qui lui a valu une véritable reconnaissance à l'international, la maison a connu l'explosion de la fiction avec le phénomène Harry Potter. Les auteurs de "Folio junior" comme Michael Morpurgo, Jean-Claude Mourlevat et Timothée de Fombelle appartiennent désormais au patrimoine de la littérature jeunesse, et leurs livres figurent sur la liste des ouvrages recommandés aux collégiens par l'Education nationale. L'éditeur les fête avec la "Bibliothèque Gallimard Jeunesse", lancée pour les 40 ans, de beaux objets à la couverture "soft touch".

"Les ventes se sont déplacées sur les jeunes adultes. Mais nous nous attachons à publier pour notre coeur de cible, les 8/12 ans, l'âge de "Folio Junior", en développant les "Romans Junior", en créant la "Bibliothèque Gallimard Jeunesse", en lançant de nouveaux auteurs et pérennisant ceux du fonds de ces dernières décennies", constate Christine Baker, éditrice d'Harry Potter installée Londres, toujours sur la piste du prochain Roald Dahl. Pour trouver de nouveaux auteurs, Gallimard Jeunesse a lancé un concours de premiers romans sur le Net (en plus des 8 000 manuscrits reçus chaque année) et mène une grande enquête, en partenariat avec Ipsos et Le Parisien, sur la lecture des 7-15 ans, qui sera dévoilée à Montreuil.

Hedwige Pasquet se dit frappée par la créativité du secteur : "Le Net nous force à évoluer, en inventant des livres qui ne peuvent être concurrencés par le Net et en nous permettant d'avoir un contact direct avec nos lecteurs", souligne-t-elle, reconnaissant toutefois que le livre ne se suffit plus à lui-même. "L'éditeur doit l'accompagner jusque dans les mains du lecteur et aider les parents à se repérer. Ceux-ci nous font confiance, c'est une énorme responsabilité", >constate-t-elle.

Livres-CD, séries animées autour des personnages Pénélope, Rita et Machin, l'âne Trotro... Gallimard Jeunesse se veut "multisupport", mais "un de nos challenges est incontestablement le numérique, même si le marché français est encore balbutiant », déclare Hedwige Pasquet. La maison publie désormais simultanément ses romans à la fois sur papier et en numérique. Depuis deux ans, elle a développé, avec la complicité de Terence Mosca, consultant pour la maison sur le sujet, un programme important d'applications pour l'iPad (et bientôt pour Android), "support naturel de notre activité éditoriale au même titre que l'audio ou l'audiovisuel à la fois par l'utilisation de nos illustrations et par l'interactivité des tablettes", indique Hedwige Pasquet. Contes avec le Britannique Nosy Crow, documentaires "Mes premières découvertes", "Univers Gallimard jeunesse" avec Pénélope, coéditions avec le Centre Pompidou ("Pompidou Kids") et la RMN : Gallimard Jeunesse teste tous azimuts et prépare actuellement des ebooks enrichis pour les petits autour de La belle lisse poire du prince de Motordu et du Petit Prince.

Le rachat de Flammarion par Gallimard va-t-il peser sur la maison ? "Il n'est pas prévu de fusionner les marques et les maisons d'édition qui sont complémentaires et fortes individuellement. Antoine Gallimard s'est exprimé clairement et annoncé qu'il y aurait une réflexion autour des fonctions support", répond Hedwige Pasquet. "Le métier évolue et on se doit de trouver l'équilibre entre le côté artisanal et la nouvelle ère industrielle. Aux débuts de Gallimard Jeunesse, tout le monde était "multifonction". Aujourd'hui, on est obligé de se spécialiser de plus en plus", note-t-elle. L'avenir ne lui fait pas peur : papier et numérique coexisteront. "Un album restera une histoire partagée avec un enfant sur les genoux. Qui aurait pu imaginer les applications il y a dix ans ? Je pense que chaque époque génère sa créativité", assure-t-elle, optimiste

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