Orages cervicaux. Quelque chose ne tourne pas rond dans le ciboulot d'Omer. On le comprend dès les premières lignes de ce roman au titre énigmatique, Un petit peu malheureusement. Pourtant, rien n'est jamais dit puisque c'est Omer qui parle, pense, ressent, voit, juge, projette. Il n'a que 12 ans mais est en partance pour une étrange terminale. Son intelligence supérieure est bluffante. Mais savoir que le « c » et le « t » ne se prononcent pas dans le mot « exact » est « un petit peu malheureusement » un motif de rejet social. Un surdoué, se dit-on. Certes, mais un sous-doué dans d'autres domaines. Notamment affectif. Hypersensible, il ne supporte aucun débordement humain, aucun contact tactile, aucune émanation du corps, pleurs, etc. Le malheureux Adam Fize a le malheur de sentir mauvais, alors Omer lui balance un gros dico sur la tête. La tentation d'employer le mot « autiste » est forte. Claire Castillon, elle, ne le fait pas. C'est la force de ce récit de ne jamais coller d'étiquette. Le nom des lieux ne nous est d'aucune aide. Le lecteur subodore que « l'internat », antichambre de la terminale, est bien autre chose qu'une école. Traversé d'orages cervicaux, Omer fomente une mission de « rebootage » dans le monde de l'après-apocalypse. On entre dans ce monologue fou avec autant d'empathie que d'aversion car Omer est loin d'être un petit gars sympa. Si tout est narré avec brio, cruauté et précision, le plus réussi est encore l'amour inconditionnel des parents. Toujours aux côtés de leur fils, mais toujours à côté. Cachant leurs larmes. Omer ne supporte pas la pitié...
Un petit peu malheureusement
Gallimard
Tirage: NC
Prix: 10,50 € ; 160 p.
ISBN: 9782075217149