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Dix ans de palmarès

Cinq des 22 auteurs distingués depuis 2005, de g. à d. : Delphine de Vigan, Philippe Claudel, Sofi Oksanen, Laurent Gaudé, James Salter. - Photo O. Dion - R. Bato - T. Harkonen - M. Melki - O. Dion

Dix ans de palmarès

Depuis 2005, 300 libraires dévoilent chaque année à Livres Hebdo leur palmarès des romans de la rentrée littéraire. On y découvre qu’ils mêlent choix pointus et emballements enthousiastes, et qu’ils ont quelques chouchous.

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Par Clarisse Normand,
Créé le 25.09.2015 à 14h01 ,
Mis à jour le 28.09.2015 à 09h57

En 2005, Livres Hebdo donnait une nouvelle dimension à son palmarès de rentrée créé au milieu des années 1990 afin de permettre aux libraires de juger la production littéraire de l’automne et de faire part de leurs préférences. En faisant appel à l’institut I+C, il fait reposer le palmarès sur une enquête à la méthodologie éprouvée, réalisée auprès de quelque 300 libraires appartenant à différents circuits de vente. Au terme de cette période symbolique de dix ans, de 2005 à 2015, quelles observations peut-on formuler sur le palmarès et son évolution ?

Il faut en premier lieu constater la belle et continue mobilisation des libraires pour communiquer leurs choix. Selon l’institut I+C, qui recueille par téléphone les informations, l’accueil réservé à cette enquête par les interviewés est particulièrement positif et suscite une réelle implication de leur part. Le deuxième niveau de librairie affiche même depuis 2005 une participation de plus en plus active qui témoigne sans doute de l’évolution qualitative de ce circuit.

Concernant le palmarès lui-même, il apparaît chaque année comme un savant mélange entre exigences littéraire et commerciale, avec une fidélité évidente à certains auteurs et certaines maisons. Sur la période 2005-2015, en dépit d’une production moyenne de quelque 600 nouveautés littéraires chaque automne, on retrouve, parmi les lauréats, deux fois Philippe Claudel, Laurent Gaudé, Delphine de Vigan et Toni Morrison. Mais à côté des chouchous, on compte aussi chaque fois une poignée de premiers romans. Parmi eux certains font même l’objet d’un véritable plébiscite et s’imposent comme lauréats. En littérature française, Jonathan Littell fait, certes, figure d’exception, mais, en littérature étrangère, trois romanciers traduits pour la première fois en français ont occupé la première place du podium : Nicole Krauss en 2006, Sasa Stanisi en 2008 et Sofi Oksanen en 2010.

Cote d’amour

Dans le même esprit, parmi les 20 premiers titres de chaque palmarès, on constate que les jeux sont nettement plus ouverts en littérature étrangère. Chez les Français, la palme des auteurs cités revient, haut la main, à Amélie Nothomb. Imbattable toutes nationalités confondues, elle apparaît dans tous les classements annuels. La performance est bien sûr liée au rythme de production de l’auteure, mais elle est néanmoins remarquable. En littérature étrangère, le plus cité est nettement plus inattendu puisqu’il s’agit de la discrète écrivaine turque Elif Shafak, qui coiffe au poteau Colum McCann et Jim Harrison. Apparue dans notre classement dès son premier roman traduit en français, La bâtarde d’Istanbul, Elif Shafak a continué, au fil de ses parutions, à séduire les libraires de manière plus ou moins significative. Témoignant d’une attention particulière pour les nouveaux talents en littérature étrangère, ces derniers ont de la même façon plébiscité sur plusieurs années l’Indien Tarun Tejpal et l’Américain né en Ethiopie Dinaw Mengestu, découverts respectivement en 2005 et en 2007 avec leur premier roman, Loin de Chandigarh et Les belles choses que porte le ciel.

Au-delà des titres et des auteurs, le palmarès fait apparaître la cote d’amour des éditeurs auprès des libraires, avec dans le tiercé gagnant Actes Sud, Gallimard et Albin Michel, trois maisons indépendantes attentives à la librairie. Comme quoi, rien n’est totalement fortuit.

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