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Éditeur français arrêté à Londres : La Fabrique dénonce "un arbitraire d’État"

La Foire du livre de Londres - Photo Fabrice Piault/LH

Éditeur français arrêté à Londres : La Fabrique dénonce "un arbitraire d’État"

Au lendemain de la libération de leur responsable des droits étrangers Ernest M., les éditions La Fabrique ont publié un communiqué dans lequel elles dénoncent les conditions de l’interrogatoire de leur collaborateur ainsi que les motifs qui ont conduit à son arrestation. 

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Par Charles Knappek,
Créé le 19.04.2023 à 18h50 ,
Mis à jour le 20.04.2023 à 10h22

Arrêté le soir du 17 avril à Londres, Ernest M., responsable des droits étrangers aux éditions La Fabrique, a été libéré dans la soirée du 18 avril. Le jeune éditeur n’en a toutefois pas fini avec la justice outre-Manche : il n’a pas récupéré son ordinateur ni son téléphone portable, et son employeur indique qu’il est convoqué dans quatre semaines pour être présenté à la cellule antiterroriste britannique.

Dans un communiqué, La Fabrique dénonce par ailleurs les conditions de l’interrogatoire au cours duquel il a été demandé à Ernest M. de « nommer les auteurs “antigouvernementaux” » du catalogue des éditions. « Au-delà de la situation scandaleuse de l'antiterrorisme qui enquête sur les intentions et la vision politique et philosophique de personnes en privation de liberté, aucune de ces questions ne devrait être pertinente pour un officier de police britannique, déclare la maison d’édition fondée par Éric Hazan. En outre, poser des questions au représentant d'une maison d'édition, dans un cadre antiterroriste, sur les opinions de ses auteurs, c'est pousser encore plus loin la logique de censure politique et de répression des courants d'idées contestataires. »

En raison de la législation antiterroriste britannique, unique en Europe en ce qu’elle permet d'interpeller, de détenir et d’interroger des justiciables qui s’exposent automatiquement à des poursuites judiciaires s’ils refusent de coopérer, La Fabrique exprime également ses inquiétudes face à « un arbitraire d’État totalement opaque ».

Enfin, la question de l’implication de la police française dans l’arrestation d’Ernest M. n’est pas levée. Ni les services du ministère de l’Intérieur (qui n’ont pas répondu à nos sollicitations) ni l’avocate d’Ernest M., MeMarie Dosé, n’ont été en mesure de confirmer une implication de la France. Dans son communiqué, La Fabrique estime néanmoins que la police britannique a posé des questions qui « semblent lui avoir été soufflées par les services français ». L’éditeur y voit un « précédent pour toute personne qui exerce un travail intellectuel et dont la production peut être jugée gênante par le pouvoir ». « Si n'importe quel téléphone et ordinateur contenant des manuscrits confidentiels, des sources journalistiques ou sociologiques peut être subtilisé, intégralement analysé et décrypté par une police étrangère bénéficiant de prérogatives draconiennes du fait de sa législation d'exception, les libertés de la presse, académiques, d'expression et les droits à la protection des données personnelles sont très sérieusement menacés », conclut le communiqué.

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