Grand prix Livres Hebdo 2013 des Bibliothèques

Vote à main levée, y compris sur écran pour Dany Laferrière retenu à Montréal (au fond), pendant les délibération du jury. - Photo Olivier Dion

Grand prix Livres Hebdo 2013 des Bibliothèques

Le 4e grand prix Livres Hebdo des Bibliothèques, présidé par Dany Laferrière, a récompensé le réseau de Saint-Quentin-en-Yvelines pour la cohérence de sa politique tournée vers l’usager. On retrouve ce souci du public chez tous les lauréats : la ludo-médiathèque de Fosses, la médiathèque du Marsan, celle du Kremlin-Bicêtre, le réseau des BM de Montréal, ainsi que la petite bibliothèque de Saint-Aubin-du-Pavail.

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Par Véronique Heurtematte,
Créé le 29.11.2013 à 14h34 ,
Mis à jour le 09.04.2014 à 17h41

Avec les candidatures de 6 bibliothèques canadiennes, de 2 bibliothèques marocaines et d’une bibliothèque belge, le grand prix Livres Hebdo des Bibliothèques a pris une dimension réelLivres Hebdo a reçu 88 dossiers provenant de 50 villes, soit un taux de participation supérieur à l’année dernière. « Il y a beaucoup de très bons dossiers avec des projets très pertinents, a souligné Dany Laferrière, président du jury, lors de la délibération à laquelle il a participé depuis Montréal, via une connexion Skype, n’ayant pas hésité à se lever à 5 heures du matin pour participer aux échanges animés qui se déroulaient au siège de Livres Hebdo à Paris. Je constate avec plaisir qu’aujourd’hui le silence n’est plus de mise dans les bibliothèques, comme c’était le cas auparavant dans celles que je fréquentais. »

Depuis Montréal, Dany Laferrière a présidé (à 5 heures du matin pour lui) les délibérations du jury par grâce à une liaison Skype. - Photo OLIVIER DION

Cette année encore, les candidatures, qui provenaient de bibliothèques municipales, départementales ou universitaires, de grandes métropoles comme de tout petits villages, ont illustré la vitalité du réseau de lecture publique en France et chez nos voisins francophones. Seize établissements ont postulé pour le prix de l’Accueil, 25 pour celui de l’Animation, 20 pour le prix de l’Espace intérieur, tandis que celui de l’Innovation rassemblait le plus grand nombre de candidats avec 27 dossiers.

« Je suis impressionné par l’engagement et la conviction que ces équipes déploient pour mettre le livre et la lecture à la portée de tous », s’est enthousiasmé Olivier Bétourné, P-DG des éditions du Seuil.

Le jury, de gauche à droite : Laurence Santantonios (Livres Hebdo), Françoise Legendre (dir. des BM du Havre, lauréates 2012), Sylviane Friederich (dir. de La Librairie à Morges, Suisse), Olivier Bétourné (P-DG des éditions du Seuil), Alexia Annequin (chargée de communication), Françoise Dury (dir. de la bibliothèque de Namur, Belgique, présidente de l’APBD), Claude Poissenot (sociologue, université de Nancy), Christine Ferrand (rédactrice en chef de Livres Hebdo). Absent de la photo : Dominique Lahary (directeur adjoint de la BD du Val-d’Oise).- Photo OLIVIER DION

Beaucoup de dossiers mettent en avant la médiation et la dimension sociale de leurs actions comme étant le cœur de leur mission, signe que la réorientation des priorités des collections vers les usagers est bien à l’œuvre. Dans les grandes structures comme dans les petits établissements : le grand prix Livres Hebdo des Bibliothèques a distingué cette année aussi bien le vaste réseau municipal de Montréal (45 bibliothèques desservant 1,7 million d’habitants) et celui de Saint-Quentin-en-Yvelines (8 médiathèques desservant 150 000 habitants) que la petite médiathèque de 160 m2 à Saint-Aubin-du-Pavail qui compte 744 administrés ! <

Grand prix : Saint-Quentin-en-Yvelines, une philosophie du mouvement

A côté de l’offre classique, le réseau de Saint-Quentin-en-Yvelines ne cesse d’imaginer de nouveaux services, tout en remettant sans cesse en question ses pratiques pour mieux coller à l’évolution du public.- Photo PHOTO COMMUNAUTÉ D’AGGLOMÉRATION DE SAINT-QUENTIN-EN-YVELINES

Le travail de fourmi quotidien du réseau des médiathèques de Saint-Quentin-en-Yvelines ne doit pas cacher son extrême ambition : « Permettre à chaque citoyen de comprendre le monde, d’y trouver sa place et de participer à sa construction. » Une belle profession de foi qui passe par la remise en cause permanente de son action pour un objectif clair : rendre les bibliothèques faciles à utiliser, adaptées à tous les modes de vie, en mettant au centre la satisfaction de l’usager. Le projet, exemplaire, a convaincu l’ensemble du jury. Après dix-huit mois de labeur acharné, qui a bien souvent bousculé les habitudes de travail, l’équipe de ce réseau, qui comporte huit établissements, un bibliobus et un centre de ressources pour les professionnels de l’enfance, a mis en place de nouveaux services : prêt de documents en nombre illimité, possibilité de réserver et de faire acheminer un document depuis n’importe quel point du réseau, envoi des informations aux usagers par SMS ou courriels, prêt de liseuses, installation de boîtes de retour des documents 24 heures sur 24 dans chaque bibliothèque, ouverture de la e-médiathèque, considérée comme la neuvième bibliothèque du réseau, réaménagement des espaces intérieurs des établissements, lancement d’un plan de communication sur les services et pas seulement sur le programme d’animation.

Des initiatives, certes pas révolutionnaires, mais qui prennent en compte les besoins des usagers, comme l’a souligné le jury, et dont les effets positifs se sont fait sentir immédiatement : 49 000 adhérents, soit presque un tiers des habitants de l’agglomération, des prêts à nouveau en hausse après cinq ans d’érosion (1 million au cours de l’année 2012), une augmentation massive des réservations et de la circulation des documents entre les médiathèques.

Deux autres aspects du projet d’établissement ont particulièrement retenu l’attention des jurés : l’accompagnement au changement de l’équipe (140 collaborateurs) par la direction des ressources humaines, avec la mise en place d’un plan de formation, ainsi que la volonté affichée de faire de cette démarche un « work in progress ». Loin de se reposer sur ses lauriers, l’équipe réfléchit déjà aux prochaines améliorations à apporter au réseau, parmi lesquelles la gratuité totale et une nouvelle carte horaire.

Ce qu’en pense le jury

Comme le résume le sociologue Claude Poissenot, le jury a été sensible à «un travail de fond qui vise à reformuler le service des bibliothèques non plus à partir des collections, mais à partir de la population à desservir, C’est un travail de longue haleine entrepris il y a plusieurs années et qui se poursuit toujours. Le changement est désormais permanent. C’est ce qui fait de cet établissement un exemple. Il incarne la vie ! » V. H.

Coup de cœur : la médiathèque de Saint-Aubin-du-Pavail est un "véritable univers de roman"

En se plaçant sous le parrainage de Phileas Fogg, l’intrépide héros du roman de Jules Verne dont elle porte le nom, la médiathèque de Saint-Aubin-du-Pavail, commune de 744 âmes à proximité de Rennes, affiche clairement ses ambitions : offrir aux habitants un lieu accueillant, confortable, habité par l’esprit d’aventure, le rêve, et largement ouvert à tous les horizons. Pari tenu pour ce tout petit établissement de 160 m2 qui a enthousiasmé le jury, et en premier lieu son président, Dany Laferrière, par son incroyable dynamisme, ainsi que par la qualité et la diversité de son offre.

Grâce à l’inépuisable énergie de son unique salarié et à la forte implication d’une quinzaine de bénévoles, la médiathèque est devenue le lieu de rendez-vous incontournable du village où l’on vient pratiquer la couture, parler cinéma, musique et littérature lors du Café palabre, regarder une exposition de photos, s’initier à la calligraphie, bénéficier de séances d’aide aux devoirs, tourner un court-métrage ou profiter de séances gratuites de massage shiatsu, l’un des ateliers qui rencontre le plus vif succès. Les habitants sont de plus en plus nombreux à proposer de mettre leurs talents au service de la communauté en animant des ateliers à la médiathèque, devenant cocréateurs des activités qui s’y déroulent et consacrant l’établissement comme lieu de vie et de lien social privilégié dans le village. C’est aussi tout naturellement, sous un chapiteau placé à l’entrée de la médiathèque, que les associations de la commune ont organisé en 2012 leur premier forum.

Aujourd’hui, près de la moitié des habitants sont inscrits à la médiathèque. « 47 % d’inscrits, c’est remarquable ! » relève Françoise Dury, directrice de la bibliothèque centrale et itinérante de Namur, présidente de l’Association professionnelle des bibliothécaires et documentalistes (APBD). « C’est un véritable univers de roman ! » s’exclame Dany Laferrière. V. H.

Prix de l’Accueil : la ludo-médiathèque de Fosses donne à lire et à jouer

Le choix d’un magazine.- Photo MÉDIATHÈQUE DE FOSSES

C’est un vent rafraîchissant et, mine de rien, assez décoiffant que fait souffler sur le monde des bibliothèques la ludo-médiathèque de Fosses, une commune de 9 500 habitants dans le Val-d’Oise. En plaçant le jeu et les jouets au cœur de son projet, ce petit établissement de 700 m2 ouvert en novembre 2012 a créé un lieu pas comme les autres. « On a repoussé nos limites, réinterrogé tout ce qu’on savait du métier. On a gardé le meilleur et jeté l’obsolète », résume Caroline Makosza, directrice de la ludo-médiathèque.

L’accueil et la convivialité y sont les maîtres mots et l’équipe joue la carte de la proximité : les bibliothécaires se présentent par leur prénom, papotent avec les visiteurs, jouent avec les plus jeunes. Tout est fait pour que les usagers se sentent chez eux : la bibliothèque devient un lieu ludique, un lieu de permissions et pas d’interdictions. On y vient pour emprunter un livre (15 000 au total), lire la presse (68 titres), boire un café et, bien sûr, pour jouer (900 jeux et jouets).

L’équipe a à cœur de rendre les choses faciles : il n’y a quasiment pas de limite au nombre de documents qu’on peut emprunter. Quant à la date de retour, elle est assez élastique : « Prenez votre temps ! » Les bibliothécaires se montrent à l’écoute : « On se rend disponible et on essaie de répondre à toutes les demandes, explique Caroline Makosza. On écoute, on observe, on analyse. Et, s’il le faut, on change, on s’adapte en prenant en compte les remarques et les suggestions des gens. »

La bibliothèque, après y avoir longtemps réfléchi, a fait le choix de ne pas installer d’automates de prêt, jugés comme n’étant pas « dans l’esprit du lieu ». Le visiteur trouvera toujours quelqu’un de souriant à qui poser une question ou tout simplement pour bavarder. Mais la convivialité n’est pas obligatoire. On peut également réserver ses documents par Internet et passer juste le temps de les retirer. Le public (plus de 40 000 entrées entre janvier et octobre 2013) a cependant généralement envie de profiter de l’endroit. Les familles s’installent, passent l’après-midi et restent parfois pour faire goûter les enfants. C’est souvent bruyant, pas toujours très bien rangé, mais tellement vivant.

 

Ce qu’en pense le jury. « C’est une bibliothèque vivante, amusante, qui place le jeu au cœur de son action sans que cela n’enlève rien au livre, s’enthousiasme Dany Laferrière. Il y a un côté fourre-tout mais c’est en fait très organisé et l’on sent un lien étroit entre les bibliothécaires, le public, la ville autour. Cela crée une atmosphère d’une gaieté folle. On devrait faire la même chose pour les adultes. » Pour Claude Poissenot, c’est un endroit « révolutionnaire, basé sur l’écoute et l’accessibilité qui reçoit trois fois plus de visites par habitant que la moyenne nationale, ce qui prouve que c’est une formule qui fonctionne ». Seul regret exprimé par Laurence Santantonios, «la fermeture entre 12 heures et 14 heures». V. H.

Prix de l’animation : Montréal, un club de lecture «irrésistible»

Le club des Irrésistibles : des discussions, des préconisations de lectures, des présentoirs d’Irrésistibles, une émission radio, un prix…- Photo PHOTO BIBLIOTHÈQUES DE MONTRÉAL

Avec ses 30 000 visiteurs en 2012 et ses déclinaisons, le club des Irrésistibles des bibliothèques de Montréal est devenu un véritable phénomène. Créé en 2007 par une lectrice passionnée de littérature comme un modeste groupe de lecture local, il est devenu au fil des ans un véritable « écosystème ». Aujourd’hui, 18 des 45 bibliothèques du réseau accueillent les rencontres hebdomadaires de leur club des Irrésistibles qui rassemblent en tout chaque semaine plus de 200 personnes venues parler de leurs coups de cœur littéraires. Une version en ligne du club permet aux membres de partager leurs découvertes en matière de littérature, mais également de cinéma ou de théâtre, et de l’ouvrir largement : les membres du club proviennent en majorité de Montréal mais aussi du reste du Canada, d’Europe, d’Australie ou encore d’Amérique du Sud !

Chaque jeudi, des livres recommandés par les membres sont labellisés « Irrésistibles ». Ils reçoivent une étiquette, une mention spéciale dans le catalogue en ligne, et sont présentés dans les bibliothèques sur un présentoir spécial et avec une scénographie adaptée. « Cette section est très appréciée des usagers et ces livres sont très empruntés », souligne Louise Guillemette-Labory, directrice du réseau. Les meilleures critiques sont relayées dans une émission radiophonique hebdomadaire locale.

Chaque année, les membres du club décernent le prix du club des Irrésistibles au cours d’un grand événement. L’œuvre est choisie parmi une sélection de 5 titres dans les parutions récentes ou plus anciennes. «En plus d’animer la communauté des lecteurs et de leur permettre de partager leur passion avec d’autres, le club des Irrésistibles permet de mettre en valeur de nombreuses œuvres littéraires et de révéler des chefs-d’œuvre méconnus ou passés inaperçus lors de leur sortie », indique la directrice. Jamais à cours d’idées, les animateurs du club promettent des innovations, en particulier des vidéos de portraits et de rencontres d’auteurs à consulter sur Internet.

 

Ce qu’en pense le jury. «Les usagers sont vraiment au centre de cette action déclinée autour de coups de cœur littéraires, note Françoise Legendre, directrice du réseau des bibliothèques du Havre, grand prix Livres Hebdo des Bibliothèques 2012. C’est l’occasion de provoquer des rencontres humaines, mais aussi de mettre les livres en valeur par une scénographie, de proposer des développements dans le monde virtuel et une valorisation dans le catalogue. C’est une démarche simple mais concrète et efficace qui permet la rencontre entre des textes et des personnes. » V. H.

Prix de l’espace intérieur : la médiathèque du Marsan ou la lecture à ciel ouvert

Vitrée, lumineuse, percée en son centre par un patio en forme de feuilles d’acanthe, la médiathèque du Marsan joue à nous perdre entre l’intérieur et l’extérieur.- Photo PHOTO ARCHI5 ET LE MARRSAN AGGLO

Une place culturelle ouverte » : c’est ainsi que l’architecte Jacques Sebbag du cabinet Archi5 et l’équipe des bibliothécaires ont imaginé la médiathèque du Marsan, une agglomération de 18 communes et 56 000 habitants dans les Landes. Pour le jury des Emirates Glass LEAF Awards 2013, un concours international qui récompense depuis dix ans des projets de référence en matière architecturale, ce bâtiment de 4 750 m2 tout en transparence, formé d’un carré de 60 mètres de côté, est tout simplement « l’un des plus beaux édifices publics du monde de ces dernières années ».

Le patio intérieur, dont le dessin s’inspire des peintures de Matisse représentant des feuilles d’acanthe, en constitue l’élément le plus orignal et le plus impressionnant. Bien plus qu’un simple geste architectural, cette réalisation est au service du projet de la médiathèque : « C’est un espace public unifié et partagé entre tous qui favorise la transmission culturelle, la sociabilité et l’échange, les passerelles intergénérationnelles », défend Laurent Dierckens, directeur de la lecture publique du Marsan.

Véritable épicentre de la médiathèque, ce patio est indissociable de l’ensemble de la réalisation. C’est un lieu dans le lieu, qui organise les fonctions de la médiathèque et ses flux. Il guide les pas des lecteurs vers les collections et fait communiquer les pôles documentaires : le pôle jeunesse, le pôle Intermezzo (un espace intergénérationnel proposant un fonds pour les adolescents, des BD, des collections pour l’apprentissage des langues, l’autoformation, des CD et des DVD) et le pôle adulte. Des places pour une lecture détendue sont réparties de part et d’autre des parois. Accessoirement, ses murs peuvent se transformer en supports pour une exposition. N’importe quel document de la médiathèque peut être pris pour être lu dans le patio tout en buvant une boisson et en dégustant un sandwich. C’est un espace à ciel ouvert, où l’on peut parler, penser, se rencontrer, se donner rendez-vous.

Ouverte en novembre 2012 dans l’hypercentre de la ville de Mont-de-Marsan (31 000 habitants), la médiathèque a immédiatement rencontré l’adhésion du public avec 15 500 inscrits, soit près de 28 % de la population de l’agglomération du Marsan, mais aussi plus de 205 000 visites et 290 000 prêts.

 

Ce qu’en pense le jury. Olivier Bétourné, P-DG des éditions du Seuil : «J’ai défendu ce dossier sans réserve pour la beauté du lieu. La manière dont l’architecture capte la lumière favorise la lecture et l’acquisition des connaissances, et crée le sentiment d’être dans un espace propice à la concentration. Le bâtiment lui-même trouve sa place dans un plan d’urbanisme cohérent. » V. H.

Prix de l’innovation : le Kremlin-Bicêtre ou la réinvention du métier

L’équipe, son organisation et ses objectifs sont comme l’architecture du bâtiment et le lettrage créé spécialement : innovants, énergiques et modernes.- Photo PHOTO MÉDIATHÈQUE DU KREMLIN-BICÊTRE

De la signalétique confiée à une artiste à l’accueil basé sur le mot d’ordre « Venez avec votre corps », qui a conduit les médiathécaires à s’affranchir des banques de prêt pour aller à la rencontre des usagers en circulant dans les espaces, et à proposer des modes d’assises et de consultation très diversifiés, L’Echo, la nouvelle médiathèque du Kremlin-Bicêtre dans le Val-de-Marne, ouverte au public en décembre 2012, est innovante par bien des aspects. Mais ce qui a convaincu le jury de lui attribuer le prix de l’Innovation, c’est la démarche entreprise de réinventer le métier de bibliothécaire en valorisant l’essentiel : la médiation. La réflexion sur l’organisation du temps de travail a conduit l’équipe à considérer les tâches uniquement sous l’angle du bénéfice pour le public. Conséquences : une augmentation de 11 heures des horaires d’ouverture hebdomadaire de la bibliothèque, la réduction du temps alloué au travail technique (catalogage, équipement des documents), le développement de partenariats avec les fournisseurs pour recevoir des sélections de documents établies en fonction des grandes orientations des collections.

« Les activités d’accueil et d’animation répondent à un besoin social sans précédent. Alors pourquoi ne pas déplacer la hiérarchie des valeurs et considérer à leur juste mesure ces missions professionnelles mésestimées ? », plaide Héloïse Courty, directrice de la médiathèque. Le temps de travail est dédié à 50 % à l’accueil du public, 20 % à celui des collectivités et à l’action culturelle, soit 70 % au contact direct du public, et 30 % pour les tâches techniques. Inspirée par la philosophie du care, construite autour du souci d’autrui, l’équipe place son utilité sociale au premier plan de son action. Le personnel est davantage impliqué dans le projet d’établissement avec l’objectif d’élever le niveau des compétences communes (tout le monde reçoit des groupes, maîtrise les ressources électroniques, fait des actions hors les murs, etc.). L’action culturelle est élaborée de manière transversale par des groupes de projets à géométrie variable qui se renouvellent régulièrement.

 

Ce qu’en pense le jury. « J’ai été très sensible aux partenariats établis avec les libraires, souligne Sylviane Friederich, directrice de La Librairie à Morges, en Suisse, ainsi qu’au travail mené pour repenser les fonctions et les tâches des bibliothécaires. Il y a 3 postes d’accueil. Cela montre l’importance accordée à cette mission et la volonté du personnel de se montrer d’une grande disponibilité envers le public. » Dominique Lahary, ancien directeur adjoint de la bibliothèque départementale du Val-d’Oise, aujourd’hui à la retraite, y voit, de son côté, la démonstration que « l’innovation ne porte pas sur une méthode ou une technique, mais sur une conception d’ensemble de l’organisation du travail ». V. H.

La boîte à idées

 

Les bonnes pratiques remarquées par le jury

 

Parti de Limoges, le logo de la BFM s’est promené jusque dans le désert de Gobi.- Photo PHOTO BFM

La grande campagne photo de la bibliothèque francophone multimédia de Limoges. Lancée en juin dernier, elle conviait les usagers de la bibliothèque à se mettre en scène pendant leurs vacances avec le sac en toile que distribue la bibliothèque. Les lecteurs se sont pris au jeu et le grand cabas portant le logo de la bfm a été ainsi immortalisé de Cuba à Bora-Bora en passant par le Guilvinec. Un diaporama des photos tourne depuis en boucle sur les murs du hall de la médiathèque. Une manière astucieuse de communiquer en utilisant l’imagination des usagers.

« Ceci n’est pas une carte de piscine » : une page du « non-guide » de la médiathèque de l’Orangerie à Claye-Souilly en Seine-et-Marne.- Photo MÉDIATHÈQUE DE CLAYE-SOUILLY

 

Le « non-guide » de la médiathèque de l’Orangerie à Claye-Souilly en Seine-et-Marne. Un guide original, s’inspirant des techniques de la publicité pour mieux faire connaître les ressources de la bibliothèque avec une série de photos au ton humoristique et décalé. Les bibliothécaires se sont mis en scène pour décliner de multiples manières le slogan « Ceci n’est pas… ». Par exemple : « Ceci n’est pas une carte de piscine pourtant vous pouvez plonger dans nos 3 000 DVD », « …une carte Vitale pourtant elle est indispensable à votre bien-être », etc. Résultats : un changement de l’image de la médiathèque qui s’accompagne d’une augmentation de 33 % du nombre d’inscriptions.

 

« Aller là où sont les gens ». Le credo adopté par la médiathèque François-Mitterrand des Ulis dans l’Essonne. C’est pourquoi l’équipe s’est installée deux samedis de suite en décembre 2012 dans le centre commercial de la ville. Sur le stand, à l’aspect marketing assumé, positionné à côté de celui du père Noël, les bibliothécaires ont distribué aux passants un catalogue rappelant le « look » des catalogues commerciaux en expliquant les ressources de la médiathèque. Les badauds pouvaient également tester les installations numériques, par exemple l’imprimante 3D. L’expérience, jugée très positive, sera renouvelée cette année.

 

La biblioconnection de la médiathèque de l’hôpital Raymond-Poincaré, à Garches, dans les Hauts-de-Seine. Une bibliothèque numérique interactive qui s’appuie sur l’univers du cinéma et les technologies des jeux vidéo pour faciliter l’accès de la lecture aux personnes, en particulier les enfants, en situation de handicap : le contenu d’un livre (actuellement 8 titres sont disponibles) est projeté sur un écran, les gestes effectués avec les bras et les jambes, ou relayés par des contacteurs permettant à l’utilisateur de progresser dans l’histoire.

 

La forte connexion de la médiathèque municipale de secteur de Guebwiller dans le Haut-Rhin. Dotée d’un espace numérique depuis 1999, elle est aujourd’hui le principal point d’accès à la culture numérique dans la ville avec une offre importante (atelier d’écriture en ligne, prêt de tablettes, un kiosque à journaux 3D proposant 600 titres de presse française et internationale) et une forte présence sur les réseaux sociaux. En septembre 2012, elle a lancé une campagne de communication sur lesdits réseaux ainsi que par un affichage dans toute la ville pour mieux faire connaître ses services numériques.

La bibliothèque écologique du Boisé à Montréal. Un modèle particulièrement réussi de connexion avec la nature. La réalisation de 6 000 m2 inaugurée en juillet 2013 est un bâtiment à basse consommation d’énergie dont les grandes baies vitrées offrent un panorama unique sur le parc paysager environnant. Ce dernier fait partie intégrante de l’univers de la bibliothèque, notamment avec les parcours littéraires dans le bois proposés grâce à des audioguides sur lesquels sont enregistrés des poèmes et des textes littéraires dits par des artistes réputés.

V. H.

 


29.11 2013

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