France culture

Toute de violet vêtue, sa couleur emblématique, France Culture voit la vie en rose : Olivier Poivre d’Arvor et ses équipes lui préparent un anniversaire digne de ce nom, avec notamment l’installation sur 20 000 m2 « du plus grand studio du monde », les 6, 7 et 8 septembre prochains au Palais de Tokyo, « pour un grand marathon radiophonique où l’édition et les écrivains auront une part très importante ».

Lancée très exactement en décembre 1963 par une série de prestige consacrée à Marcel Proust, celle qui s’appelait auparavant RTF-Promotion (avant de s’appeler France-Culture, avec un tiret) fera tout d’abord l’objet, dès le 22 juillet, d’une émission d’Emmanuel Laurentin et Philippe Garbit, avec 30 heures d’archives rediffusées sur six semaines. Une goutte d’eau pour cette « bibliothèque sonore d’exception » dans laquelle il suffit de piocher pour entendre les voix de tout ce que les cultures comptent en matière d’écrivains, historiens, philosophes, scientifiques, musiciens, plasticiens et autres, passés derrière son micro.

Un livre pour raconter la chaîne.

Emmanuel Laurentin et Anne-Marie Autissier en dressent un panorama dans Les 50 ans de France Culture, le 19 juin chez Flammarion-France Culture, dans lequel, en 16 chapitres, on revisite les programmes emblématiques, les temps forts et les grands thèmes de la radio, entretiens inédits et images d’archives à l’appui. Rien de plus normal qu’un livre pour raconter la chaîne que l’on appelle souvent « la radio des livres », dont la nouvelle et forte tendance, depuis février 2012, est d’ailleurs de s’écrire, avec pour commencer France Culture papiers. La revue, dont le sixième numéro vient de paraître, propose même pour la deuxième fois un contenu exclusif publié avant sa diffusion à l’antenne, un grand entretien de 18 pages avec Michel Rocard à écouter dans « A voix nue » du 17 au 21 juin. C’est le monde à l’envers ! « L’anagramme de France Culture est “Lancer ce futur? », nous fait remarquer Olivier Poivre d’Arvor, avant de passer aux festivités. « Nous ne sommes pas les otages du passé. On va regarder vers le futur avec de nouvelles émissions », poursuit-il en évoquant l’arrivée de nouveaux visages : « Mon désir, c’est que des écrivains fassent de la radio », affirme celui qui a déjà fait venir à l’antenne Charles Dantzig, par ailleurs son éditeur chez Grasset (1).

Certes, les grandes émissions littéraires seront maintenues. Pour la deuxième année, en partenariat avec Le Nouvel Observateur, la sélection des romans de la rentrée s’ouvrira à plus de livres pour couvrir la production de tout le trimestre. Comme l’an dernier, la programmation du 4 novembre coproduite par le CNL abordera en 24 heures tous les aspects du livre, des métiers à l’économie et au numérique. Et, comme un clin d’œil à sa toute première série, France Culture confiera « la rédaction en chef » de son troisième week-end de septembre à Marcel Proust, à l’occasion de la publication de l’ouvrage que lui consacrent Raphaël et Jean-Paul Enthoven (Dictionnaire amoureux de Proust, Plon, 29 août).

Audience en hausse.

Mais notre jeune quinqua florissante a des projets bien plus ambitieux. Forte d’une hausse d’audience de 25 % en 18 mois, avec 1,5 million d’auditeurs par jour et près de 6 millions de téléchargements par mois, elle tend à s’appeler Radio Plus. Après le lancement en novembre de France Culture Plus, le webmédia étudiant qui donne accès à des cours et à des conférences issus des universités et des grandes écoles, mars 2014 verra la naissance de France Culture Monde, radio sur le Web à destination des francophones réalisée avec la collaboration d’experts du monde entier.

« France Culture repose désormais sur trois pieds, explique Olivier Poivre d’Arvor : l’antenne, le numérique et les produits intellectuels de contenu. » A savoir la production de forums à la Sorbonne, avec 5 millions d’entrées. Mais aussi le développement des coéditions (voir ci-contre), avec 16 titres d’ici à la rentrée 2014 et une montée en puissance à 25-30 titres par an. « On doit tout aux livres », dit encore l’auteur de Culture : état d’urgence (Tchou, 2012), sans cacher « un véritable agacement vis-à-vis du tout numérique : il faut revenir au texte et j’ai une action militante pour cela ». Mais, c’est juré, pas question de marcher sur les platebandes des éditeurs : « Nous avons une vraie mission pour soutenir l’activité éditoriale. Restons modestes. Mais auparavant, les livres sortaient à perte, avec un trop grand décalage par rapport à la diffusion des émissions. On veut juste appuyer les choses, et toujours en collaboration avec les éditeurs. »

Radio des humanistes, France Culture, qui s’est développée à son rythme sur cinq décennies, avec un amour certain pour la connaissance et le savoir, ne veut plus être une simple radio : « C’est une galaxie, que l’on peut écouter sous toutes ses formes », déclare en visionnaire Olivier Poivre d’Arvor.

Bonnes feuilles.

En attendant, « la radio des livres » qui s’apprête à devenir « la radio qui se décline en livre » poursuivra ce qu’elle fait si bien dans sa grille d’été, avec des programmes présentés le 11 juin prochain. Elle conseillera pour la deuxième année consécutive, en partenariat cette fois avec Livres Hebdo, 30 romans de la rentrée en avant-première dans « Les bonnes feuilles » d’Augustin Trapenard et Sandrine Treiner. Elle sortira par ailleurs de ses archives 30 heures de lectures de grands classiques par des comédiens, tandis que Cécile Guilbert lira à l’antenne des manuscrits et des lettres d’écrivains, pendant 30 heures également, en collaboration avec le musée des Lettres et Manuscrits. Partenaire du Monde, qui les publiera, et de la SNCF, qui sélectionnera les textes, François Angelier (« Mauvais genres ») va adapter six « petits polars de l’été » à l’antenne. Et, à l’occasion du centenaire de la Grande Guerre, Matthieu Garrigou Lagrange va raconter « L’été 1913 » vu à travers les écrivains de l’époque pendant une semaine. <

(1) Olivier Poivre d’Arvor raconte le 21 août prochain chez Grasset l’adoption de sa fille dans un nouveau roman très personnel, Le jour où j’ai rencontré ma fille.

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