Condamnation

Le négationniste Faurisson perd son procès en diffamation contre "Le Monde"

Ariane Chemin - Photo DR

Le négationniste Faurisson perd son procès en diffamation contre "Le Monde"

Le tribunal correctionnel de Paris a retenu "l'exception de vérité", en estimant que la journaliste Ariane Chemin –qui avait écrit que Robert Faurisson était un "menteur professionnel" et un "falsificateur"– apportait la preuve de la véracité de ses propos.

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Par Clotilde Ravel
Créé le 07.06.2017 à 18h54

Mardi 6 juin, le tribunal de grande instance de Paris a tranché: écrire que le négationniste Robert Faurisson est un "menteur professionnel" et un "falsificateur" est conforme à la vérité. La journaliste du Monde Ariane Chemin, poursuivie pour diffamation, a été relaxée. Robert Faurisson l'attaquait, ainsi que l’éditeur Flammarion, pour la réédition, en septembre 2014, dans l’ouvrage commémorant les 70 ans du quotidien, d'un article publié en août 2012, intitulé "Le jour où le Monde a publié la tribune de Faurisson". Dans cette enquête, Ariane Chemin cherchait à comprendre pourquoi le journal avait décidé de publier, le 29 décembre 1978, une tribune de celui qui était alors maître de conférences à l’université Lyon-II, titrée "Le problème des chambres à gaz ou “la rumeur d’Auschwitz”".

Chose rare, les juges du tribunal correctionnel de Paris ont estimé que la journaliste apportait la preuve de la véracité de ses propos, et ont retenu "l'exception de vérité", étendue à l’éditrice du livre, également poursuivie. Robert Faurisson, aujourd’hui âgé de 88 ans, n'en était pas à son premier procès. Mais jusqu'ici, il les perdait au bénéfice de la "bonne foi" de l’auteur des propos diffamatoires. Robert Badinter, qui avait qualifié Faurisson de "faussaire de l’histoire" sur Arte en 2006, n’avait été relaxé en 2007 qu’au titre de cette condition prévue par loi de 1881 sur la presse. 

Ce premier jugement du tribunal, dont le plaignant peut faire appel, constate en revanche que "l’offre de preuve de la vérité des faits diffamatoires" apportée par la journaliste est "parfaite, complète et corrélative aux imputations dans toute leur portée". Ce qui produit un "effet absolutoire", alors que les propos sont reconnus diffamatoires. L'avocate de Mme Chemin, Catherine Cohen, a parlé d'un jour "à marquer d’une pierre blanche".

Faussaire

Lors de l’audience du 9 mai, le parquet avait invité le tribunal à ne pas prononcer une énième relaxe au titre de la bonne foi. Les juges se sont livrés à un examen minutieux des nombreuses condamnations de Robert Faurisson pour "contestation de crimes contre l’humanité", ainsi que des jugements qui le déboutaient de ses actions en diffamation. L'ancien maître de conférences à l'université de Lyon II, avait notamment soutenu que le génocide des juifs par les nazis est un mensonge destiné à récolter des dommages de guerre, que les chambres à gaz n'ont jamais existé dans les camps et que les déportés y sont morts de maladie et de malnutrition.

A la lecture d'une série de décisions de justice le concernant, en tant que partie civile et comme prévenu, rendues entre 1981 et 2014, le tribunal correctionnel de Paris a estimé qu'il "a bien été condamné pour avoir occulté et travesti la vérité historique". "Toutes ces décisions n’ont de cesse que de stigmatiser, en des termes particulièrement clairs, les manquements et les abus caractérisant ses méthodes", peut-on lire dans le jugement, signé par la présidente de la 17e chambre correctionnelle de Paris, Fabienne Siredey-Garnier. Et de rappeler "l’absence de caractère scientifique de ses travaux". Au cours de l’audience du 9 mai, qui a duré plus de six heures, le révisionniste et négationniste était resté dans son registre. "Il falsifie tout, même la jurisprudence, et parvient à tourner en victoires les procès qu’il a perdus", relate Mme Cohen au Monde.

Aujourd’hui, Ariane Chemin estime dans Le Monde que la fin de son article de 2012 était "trop optimiste" en écrivant que les historiens avaient "réduit à néant les fantasmagories de Faurisson et de son fan-club antisémite". "A l’heure de la post-vérité et des réseaux sociaux, hélas, les révisionnismes ont encore de belles heures devant eux", s’inquiète-t-elle.

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