Etats-Unis

Le récit d'une ancienne employée d'Amazon devenue SDF

Rayons d'un entrepôt Amazon

Le récit d'une ancienne employée d'Amazon devenue SDF

Nichole Gracely décrit dans une tribune pour The Guardian l'enfer qu'elle a connu en tant que salariée chez Amazon. Aujourd'hui sans domicile fixe elle affirme préférer sa situation actuelle à celle qu'elle vivait au sein de l'entreprise de Jeff Bezos.

Par Agathe Auproux,
avec The Guardian Créé le 01.12.2014 à 21h28 ,
Mis à jour le 02.12.2014 à 10h26

"Entre Amazon ou rien, autant prendre Amazon", déclarait une intérimaire dans des propos rapportés par Jean-Bapstiste Malet, qui a publié En Amazonie, infiltré dans "le meilleur des mondes" (Fayard, 2013) les résultats de son reportage sur les conditions de travail dans la société, suite à son infiltration dans le centre d’expédition d’Amazon à Montélimar. Le vendredi 28 novembre 2014, Nichole Gracely, qui était salariée chez Amazon, publie une tribune sur le site du Guardian, où elle affirme "qu’être SDF est mieux que de travailler pour Amazon".
 
"Je ne me suis jamais sentie aussi seule que lorsque je travaillais là-bas."

Nichole Gracely travaillait comme picker dans les entrepôts de l’entreprise de Jeff Bezos aux Etats-Unis, ce qui consistait à arpenter les rayonnages sur un chariot pour ramasser un maximum de produits commandés sur le site. Son témoignage commence ainsi: "Je suis sans domicile fixe. Les pires jours que je traverse en ce moment sont mieux que les meilleurs jours que je passais à travailler pour Amazon". Dans son article publié par le Guardian, cette ancienne employée chez Amazon décrit son quotidien au sein de l’entreprise, puis comment elle s’est retrouvée à la rue en 2012 après avoir manifesté contre Amazon et parlé à des journalistes, ce qu’interdit le règlement intérieur sous peine de licenciement.
 
"A un moment, j’ai cessé d’avoir peur. J’avais déjà vécu l’enfer. Je me suis levée contre Amazon.", décrit Nichole Gracely. Son enfer, c’était tous les jours dans les entrepôts de la société de e-commerce. "Je ne me suis jamais sentie aussi seule que lorsque je travaillais là-bas. Je travaillais complètement isolée et vivais sous surveillance permanente. Amazon pouvait réclamer des heures supplémentaires et je devais me soumettre à tous les changements d’emploi du temps jugés nécessaires. Et s’il n’y avait pas de travail, ils nous renvoyaient chez nous plus tôt sans être payés. J’ai commencé à me noyer sous mes factures", explique-t-elle. "On nous traitait comme des mendiants parce que nous avions besoin de ces jobs. Le pire, c’est que plus de deux ans plus tard, tout ce que je vois c’est : Jeff Bezos embauche."

"N’importe quel employeur prospectif tape mon nom dans Google et peut lire mes griefs avec mon ancien patron"
 
Depuis 2012, Nichole Gracely n’a de cesse de dénoncer les conditions déplorables de travail dont elle dit avoir été victime en tant qu’employée chez Amazon. Job qu’elle explique avoir pris car elle avait besoin d’argent, et ne pouvait se permettre d’accumuler des stages non payés qui se présentaient au début de sa carrière d’universitaire. Lorsque le conflit Amazon-Hachette a éclaté il y a quelques mois, elle brandissait toujours des panneaux dans la rue qui disaient "Je ramassais des commandes pour Amazon.com. J’ai des diplômes. J’ai été publiée. Désormais je suis SDF, j’écris et je fais ça. Toute aide est la bienvenue". Elle raconte que les gens s’arrêtent, écoutent son histoire, et lui donnent quelques billets.
 
Nichole Gracely confie n’avoir aucune économie, et affirme que personne ne fait suite aux CV qu’elle envoie, alors qu’elle dit ne pas avoir mentionné ses diplômes "pour ne pas paraître trop qualifiée", car "n’importe quel employeur prospectif tape mon nom dans Google et peut lire mes griefs avec mon ancien patron". Elle conclut sa tribune par ces mots "Il faut une force phénoménale pour arriver à passer la journée [en tant que SDF]. Je suis plus forte, en meilleure santé et plus heureuse que jamais. Il y a plus de respect pour une femme sans domicile à la rue qu’il n’y en a pour les travailleurs dans un entrepôt d'Amazon."
 

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