"Les libraires jouent bien le jeu"

Pour le public étudiant, le critère du prix est essentiel, et les collections de poche s’écoulent donc facilement. - Photo Olivier Dion

"Les libraires jouent bien le jeu"

Selon les éditeurs, la librairie aborde la rentrée universitaire dans de meilleures conditions que prévu.

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Par Charles Knappek
avec Créé le 19.09.2014 à 02h32 ,
Mis à jour le 23.04.2015 à 10h06

Malgré la disparition de Virgin et de Chapitre, la librairie aborde cette rentrée universitaire dans une situation moins mauvaise qu’on ne l’attendait. Une grande partie des enseignes Chapitre ont trouvé un repreneur et les mises en place se déroulent dans d’assez bonnes conditions selon les observateurs. "La librairie a souffert, c’est vrai, concède Julie Pelpel-Moulian, responsable éditoriale supérieur, technique et numérique chez Hachette Supérieur. Mais ces difficultés ont profité aux enseignes de niveau inférieur, sur lesquelles s’est reportée une partie de la demande. Au final, la catastrophe annoncée n’a pas eu lieu." "La crise traversée par les grandes enseignes affectent assez peu l’enseignement supérieur, mais plutôt la littérature grand public, estime pour sa part Florence Young, directrice de l’enseignement supérieur de Pearson France. Dans le supérieur, il y a d’autres vecteurs que la librairie."

Chez Dunod, les mises en place se font beaucoup grâce aux efforts des représentants, mais l’éditeur capitalise aussi sur les bonnes ventes de l’année précédente. "Elles incitent les libraires à nous suivre", indique Florence Martin, directrice marketing et communication. "Les libraires jouent bien le jeu, abonde Manon Savoye, directrice éditoriale chez Ellipses. L’an dernier, le marché a souffert des fermetures de Chapitre et de Virgin, mais nous sommes maintenant dans une phase de reprise de confiance, estime-t-elle. Chez Studyrama, le directeur du département édition, Frédéric Vignaux, note tout de même une certaine timidité des mises en place sur les thématiques de niche et les nouveautés. "Notre Bible du Tage Mage est très bien reçue en librairie. En revanche, nous ne sommes pas sur les mêmes niveaux concernant Bréal [racheté cette année par Studyrama, NDLR]. La collection "Le monde en fiches", par exemple, est placée en quantité plus réduite."

Miser sur le fonds

Cette prudence s’explique par l’importance que conserve le fonds dans les grandes librairies universitaires qui ont aussi pris conscience que celui-ci "doit être présent dans les rayons, faute de quoi le client se reporte sur le Web pour acheter ce dont il a besoin", note Manon Savoye, chez Ellipses. Cette analyse implique une gestion serrée des stocks, avec des réassorts plus rapides, et elle est partagée par Chloé Beaujouan, responsable des achats pour la partie sciences humaines, chez Decitre. "La nouveauté est importante, mais le fonds est primordial, précise-t-elle. Il représente 70 % de l’activité du rayon." La libraire confirme malgré tout le fléchissement du marché. "Certains éditeurs sont très nettement à la baisse, on sent que la dynamique n’est plus là, notamment pour les grands formats." Du coup, les mises en place s’en ressentent parfois, même si Chloé Beaujouan se fait "un devoir" d’accompagner correctement les éditeurs quand il y a un lancement de collection ou une refonte. Sans toutefois se départir d’une certaine prudence à laquelle seuls semblent échapper les livres de poche qui, eux, obtiennent de très bons résultats.

"Dès qu’on parle de petits prix, le public répond présent", constate Chloé Beaujouan. Les "Repères" de La Découverte et les "Folio essais" de Gallimard tirent particulièrement leur épingle du jeu, tandis qu’Ellipses, qui s’est doté d’une collection de poche l’an dernier, affiche pour le moment un bon démarrage. "Nous sommes très satisfaits, affirme Manon Savoye. Cela permet de faire vivre notre fonds très riche. Beaucoup de titres ne peuvent pas rester en rayon éternellement, avec le poche, nous sommes en mesure de les proposer à nouveau." Pour l’éditrice, le critère prix est déterminant auprès du public étudiant : "Si un élève hésite à payer 30 euros pour un grand format, il achète sans problème sa version en poche" Le constat est tout aussi vrai pour la petite collection poche "Audiographie" des éditions de l’EHESS vendue 8 euros, dont l’ouvrage de Jean-Pierre Vernant, De la Résistance à la Grèce antique, est le best-seller de l’année. "Cette collection introduit les grands penseurs, elle s’adresse même aux niveaux de la licence et nous a permis de monter des partenariats avec des lycées disposant de prépas intégrées afin d’y faire venir des chercheurs", expose Emmanuel Désveaux. Dunod s’adresse aussi au porte-monnaie des étudiants en publiant Révisez la physique avec Feynman. "L’édition précédente n’a pas fonctionné parce que nous la proposions à un tarif trop élevé, avoue François Bachelot, directeur sciences et techniques. Avec cette nouvelle édition, nous sommes en phase avec les prix du marché."

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