15 mars > Essai France

La seule fois où Rivarol fut insolent, ce fut avec Louis XVI, lorsque le roi lui demanda au début de la Révolution : "Que dois-je faire ?", et qu’il lui répondit : "Votre métier, Sire !" C’était sa façon d’être plus royaliste que le roi et cela pourrait être une définition de l’insolence qui nous est présentée au travers des œuvres de Rivarol, Chamfort et Vauvenargues. Ces trois auteurs n’ont pourtant rien en commun, hormis cette liberté de l’esprit qui a irrigué le XVIIIe siècle. Rivarol, pour reprendre la formule de Chantal Delsol dans sa préface, "n’a laissé que des lambeaux". S’il n’avait été paresseux, il eût été idéologue. Heureusement, ce velléitaire s’est contenté de papillonner et d’exercer son regard sur les choses et les gens de son temps. C’est ainsi qu’on devient moraliste. Chamfort est plus mélancolique, sa cruauté passe plus facilement. Quant à Vauvenargues, mort à 31 ans, il n’eut que le temps de noter un millier de maximes qui plurent tant à Voltaire.

Ce riche volume de la collection "Bouquins" établi et annoté par Maxence Caron vaut surtout pour les œuvres complètes de Rivarol qui n’étaient disponibles que dans le fac-similé de l’édition de 1808 (Slatkine reprints, 2012). Il permet aussi d’approcher cette audace qu’on confond avec l’insulte. Etre insolent, ce n’est pas avoir raison, c’est se moquer de la raison en raisonnant, c’est dire ce qu’on devrait taire par prudence ou par bonté. Mais c’est aussi l’art de la fulgurance comme ce trait de Rivarol qui devrait inspirer chaque rentrée littéraire : "Un livre qu’on soutient est un livre qui tombe."L. L.

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