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Librairie Le Failler vandalisée : le SLF alerte sur la multiplication des attaques

A Rennes, la librairie Le Failler a été victime d'une attaque ciblant l'une de ses vitrines. Une dizaine de coups a été assénée. - Photo Librairie Le Failler

Librairie Le Failler vandalisée : le SLF alerte sur la multiplication des attaques

Dans la nuit du dimanche 28 au lundi 29 septembre, l'une des vitrines de la librairie Le Failler, située dans le centre-ville de Rennes, a été endommagée. Alors que le directeur de l'enseigne dénonce une attaque symbolique contre « la liberté de penser », le Syndicat de la librairie, contacté par Livres Hebdo, alerte sur la recrudescence de ce type d’agressions ces derniers mois.

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Par Élodie Carreira
Créé le 30.09.2025 à 12h56

Une nouvelle attaque de librairie s’est produite dans la nuit du dimanche 28 au lundi 29 septembre, visant cette fois la librairie Le Failler, enseigne culturelle emblématique de la ville de Rennes. L’une de ses quatre vitrines, dédiée aux polars et à la bande dessinée, a été prise pour cible, frappée à une dizaine de reprises à l’aide d’un potelet métallique retrouvé sur place. Une nouvelle agression qui vient s’ajouter à une liste grandissante d’actes de vandalisme ciblant les librairies françaises.

Sous le choc, le directeur de la librairie Dominique Fredj a déposé plainte dès le lundi matin, avertissant la police municipale et nationale. « La vitrine ne s’est pas effondrée, mais les impacts sont terribles », déplore-t-il auprès de Livres Hebdo, précisant que son assurance devrait prendre en charge le remplacement de la vitrine.

« Attaquer les librairies, c’est attaquer la liberté de penser »

Sur place, aucun élément ne permet de déterminer les motivations de cette attaque. Pour Dominique Fredj, une chose est claire : ce n’est pas l’activité, les ouvrages ou les animations de la librairie qui sont visés, mais ce que la librairie, en tant qu’acteur socioculturel et catalyseur de débats, représente.

« S’en prendre à une librairie a un signifiant politique d’une extrême gravité. Les librairies sont des lieux de construction de la liberté de penser. Les attaquer, c’est s’attaquer à cette liberté », explique le gérant. « Cela fait 16 ans que je dirige cet établissement et je n’ai jamais connu rien de tel, même pendant les plus violentes manifestations », ajoute-t-il, évoquant toutefois une tentative, il y a deux ans, d’arrachage d’une bannière aux couleurs de l’arc-en-ciel affichée à l’occasion du mois des fiertés.

« Nous restons debout »

Pour protéger ses équipes « abasourdies par l’acharnement hors de contexte de cet événement », et tenter de les rassurer, Dominique Fredj a également alerté les autorités locales et métropolitaines. Il assure toutefois que « ce n’est pas cet acte qui va nous faire tomber ». En témoigne l’ouverture maintenue de la librairie ce lundi. « Nous restons debout et plus que jamais convaincus de nos convictions », affirme le dirigeant.

L’enseigne n’est cependant pas la seule à avoir été la cible d’importantes dégradations en 2025. En août dernier, la librairie féministe parisienne Violette and Co a annoncé porter plainte pour harcèlement, déclarant être victime d’une « campagne d’intimidation, de harcèlement, de cyberharcèlement, de dégradations et de menaces de l’extrême droite ». Quelques semaines auparavant, sa vitrine avait été dégradée par de la peinture acide.

Une multiplication des attaques visant les librairies

En juin dernier, la librairie Les Jours Heureux, à Rosny-sous-Bois, en Seine-Saint-Denis, a également été victime de vandalisme. La veille d’une rencontre autour de l’ouvrage Nous refusions, Dire non à l’armée israélienne (Libertalia) de Martin Barzilai, la serrure de la porte de la librairie a d’abord été obstruée par un amas de colle. Quelques jours plus tard, les libraires ont découvert la vitrine recouverte de tags comportant des messages accusateurs, dont « Hamas violeur ».

Même scénario, en mai dernier, pour la librairie queer Les Vagues, à Nantes, qui a vu sa vitrine brisée. Choqués, les deux dirigeants avaient dénoncé une « attaque LGBTphobe », sur une bannière dressée, dès le lendemain, devant la boutique. Là encore, les libraires, qui ont raconté avoir déjà été la cible d’actes malveillants auparavant, avaient décidé de porter plainte.

« Dans ces exemples-là, les causes ou les prétextes à ces attaques étaient bien identifiées. D’ailleurs, pendant longtemps et notamment dans les années 1970-1980, ce type d’attaques visaient particulièrement les librairies militantes. Aujourd’hui, ce phénomène s’étend aux librairies généralistes », constate Guillaume Husson, délégué général du Syndicat de la librairie française (SLF).

« La librairie doit rester un lieu de tolérance à la différence »

Outre les librairies qui rendent publique leur situation sur les réseaux sociaux ou dans la presse, le syndicat reçoit également de nombreuses alertes d’enseignes victimes de vandalisme, d’agressions physiques ou d’attaques en ligne. S’il ne dispose pas de données chiffrées, Guillaume Husson constate néanmoins une recrudescence de la violence visant les librairies dans « une société de plus en plus polarisée et intolérante, où certains considèrent qu’il faut faire renoncer les libraires à vendre des livres qui ne leur plaisent pas ».

Pour dénoncer ce phénomène et rappeler aux libraires le soutien de la filière, le syndicat prévoit de prendre prochainement la parole publiquement, à travers un discours réunissant l’ensemble de l’interprofession (auteurs, éditeurs, libraires, bibliothécaires…), « eux aussi de plus en plus souvent victimes d’attaques ». « La librairie doit rester un lieu où coexistent des livres adressés à des publics aux opinions différentes, argue Guillaume Husson. Elle doit rester un lieu de tolérance à la différence. »

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