Malaise à la Documentation française

Malaise à la Documentation française

L'éditeur public se sent menacé au cœur même de son métier. Il craint notamment une réduction de son périmètre d'activité, prévue par la révision générale des politiques publiques (RGGP).

Par Cécile Charonnat
avec cch Créé le 15.04.2015 à 22h43

L'été est plutôt morose pour les fonctionnaires de la Documentation française. Pour preuve, un collectif du personnel vient de signer vendredi 19 juillet une tribune parue dans la rubrique Opinions du quotidien Libération. L'appel proclame que « l'édition publique [est] en danger ! » et dénonce « une remise en cause » des activités de l'éditeur et notamment de sa mission de service public, c'est-à-dire « d'élaborer et de diffuser une information publique fiable, indépendamment de tous les partis ou groupes d'intérêt privés [capable] d'éclairer la lanterne du citoyen pour lui permettre de prendre part au débat public en toute connaissance de cause. »

La Documentation française, qui relève des services du Premier Ministre et est placée sous l'autorité de Serge Lasvignes, Secrétaire général du gouvernement (SGG), a pour mission de publier les documents (rapports publics, constitution, traités) émanant des administrations publiques. Mais elle dispose, notamment au travers de ses nombreuses revues telles Les cahiers français ou Problèmes politiques et sociaux (PPS), de publications propres, « véritable valeur ajoutée » de l'éditeur. Particulièrement visées par les nouvelles orientations que souhaite donner la tutelle à l'éditeur public, ces publications, écrites par des spécialistes d'horizons divers, contribuent largement à donner une information objective.

Une logique comptable plus que de service public

Le collectif redoute en effet un abandon précoce de l'édition papier au profit d'une offre numérique payante. Or, les revues, dont certaines ont des chiffre d'affaires en recul, sont en ligne de mire. Ainsi, la version papier de PPS (- 2,7% en 2007) doit être supprimée à la fin de l'année au profit d'une version Internet « dont on ne connaît pas les contours » précise un signataire de l'appel.

De plus, « rien n'assure la rentabilité de cette offre numérique payante, en contradiction avec la culture Internet qui favorise le gratuit. Et elle ne colle pas non plus avec notre mission de service public, qui est de mettre à la disposition du plus grand nombre des informations fiables », assure une autre signataire. Et de rappeler que les publications de la Documentation française, très photocopiées, sont présentes sur les étagères des bibliothèques, où elles sont cataloguées comme des usuels.

Une partie du personnel craint également qu'une « vision purement comptable » n'anime la tutelle de l'éditeur. « Nous craignons que la rentabilité exigée soit celle d'un éditeur privé. Or, l'édition publique ne répond pas aux critères du privé. La Documentation française a d'autres intérêts que commerciaux », explique une des signataires de l'appel.

Le collectif, soutenu par une intersyndicale qui regroupe la CFDT, la CGT et l'Unsa, souhaite « informer et alerter le public » sur le malaise qui agite l'éditeur. L'appel est aussi le relais public d'une pétition interne, qui a réuni 250 signataires sur 360 membres du personnel et qui a été remise début juillet au Secrétaire général du gouvernement.

Contactée, la direction ne souhaite pas faire de commentaire à cet appel. Hier, Mardi 22 juillet, les services du Premier ministre ont annoncé au personnel qu'un arbitrage serait rendu début septembre. « Espérons qu'il ne sera pas trop défavorable » soupirent les membres du collectif, qui affirment rester mobilisés.



15.04 2015

Les dernières
actualités