Entretien

Marc Bordier, Emmanuelle Henry : "Ventes en ligne et librairie physique ont vocation à se compléter"

Emmanuelle Henry et Marc Bordier, repreneurs de la librairie Arthaud à Grenoble et fondateurs de la librairie en ligne Liréka - Photo DR

Marc Bordier, Emmanuelle Henry : "Ventes en ligne et librairie physique ont vocation à se compléter"

Un an après la reprise d’Arthaud à Grenoble, ces deux anciens d’Amazon lancent Lireka, une librairie en ligne destinés aux francophones vivant hors de France qui promet des frais de port gratuits et des délais raisonnables.

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Par Cécile Charonnat,
Créé le 05.11.2021 à 13h22

Vous êtes deux anciens cadres d’Amazon aux parcours variés, comment vous êtes-vous retrouvés à la tête d’Arthaud ?
Marc Bordier : Depuis des années, nous caressions le vieux rêve d’avoir une librairie indépendante. Mais c’est l’idée de Liréka qui nous a d’abord réunis. Nous avions ce projet de grande librairie en ligne pour les Français vivant à l’étranger mais il était moins compliqué de le démarrer si nous ne partions pas totalement de zéro. L’idéal était donc de trouver une librairie physique partenaire. Nous avons alors croisé la route de Philippe Sylvestre qui a racheté Arthaud en 2014 au moment de la faillite de Chapitre mais avec l’optique de la transmettre. La cession s’est faite pendant l’été 2020.
 
Liréka s’adresse aux francophones vivant hors de France. Pourquoi cette cible ?
Emmanuelle Henry : Nous avons été expatriés et connaissons la difficulté de commander des livres français à l’étranger, sauf pour les chanceux qui disposent d’une libraire francophone à côté. Mais c’est plutôt rare. Sinon, les deux millions de français et les 250 millions de francophones établis hors de France n’ont quasiment pour seul recours qu’Amazon et sont confrontés à des catalogues réduits, des délais très longs et surtout des livres très chers. Si l’on veut faire venir un livre à New York, il faut compter 8 euros de frais de port par commande et 1,5 euro par article. Or lire en français reste un très bon moyen de garder le lien avec le pays et de transmettre la culture française, notamment à ses enfants.
 
Vous promettez une livraison gratuite à l’international, des délais raisonnables et un catalogue de plus d’un million de références. Comment faites-vous ?
MB : Pour la partie assortiment, nous nous appuyons sur le stock d’Arthaud que nous avons d’ailleurs poussé de 60 000 à 80 000 références depuis la reprise. Pour ce qui est de la logistique, nous avons négocié nos tarifs avec les transporteurs. Et nous groupons nos envois pour amortir les coûts. Les délais ne devraient ainsi pas excéder 3 à 6 jours en Europe, 5 à 9 aux Etats-Unis et au Canada et entre 6 à 12 partout ailleurs.
 
Pour la France, à l’image de vos concurrents Amazon ou la Fnac, vous pratiquez la livraison à un centime. La proposition de loi Darcos va vous obliger à augmenter vos tarifs.
MB : Oui, mais cette mesure est plutôt une bonne chose. Elle permet de rétablir une concurrence saine et équitable entre les différents acteurs. A titre personnel, j’aurais toutefois préféré un tarif postal réduit. Cela laissait la possibilité d’une livraison gratuite et assurait aux librairies indépendantes un meilleur amortissement des coûts et donc, de meilleures conditions pour développer une activité de vente en ligne.
 
En dehors du stock, que peut apporter Arthaud à Liréka ?
MB : Les deux entités ont vocation à se compléter et à se renforcer. Par exemple, Liréka sera alimentée en partie grâce au contenu éditorial produit par les libraires d’Arthaud qui possèdent un savoir-faire dans ce domaine. Les rencontres et manifestations organisées par la librairie seront également retransmises sur Liréka. Grâce à ce genre de contenu, nous comptons nous différencier d’Amazon et des autres grandes plateformes actuelles qui deviennent de plus en plus des galeries commerciales et non des librairies.
 
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Vous dirigez Arthaud depuis un an. Quels sont vos projets pour cette institution deux fois centenaire ?
MB : Il s’agit de la faire repartir sur le chemin de la croissance pour lui donner les moyens de se développer et de réinvestir. Outre l’apport de Liréka, notre projet repose sur trois axes : l’augmentation de l’assortiment pour offrir le plus grand choix aux Grenoblois et à nos clients en ligne ; le service aux collectivités et l’amélioration du caractère d’acteur culturel d’Arthaud grâce notamment aux rencontres. Notre ambition est de faire de la librairie un lieu chaleureux et communautaire. Et sur cet aspect, comme sur la logistique ou sur la vente en ligne, des profils tels que les nôtres peuvent apporter beaucoup.

EH : Nos efforts vont aussi porter sur le marketing. Nous voulons pousser ce qui est déjà fait et y apporter davantage de régularité. Nous allons produire plus de vidéos, relayer régulièrement sur les sites et les réseaux les mises en avant faites en magasin ou imaginer des associations avec des éditeurs qui déploient déjà des actions sur Internet. Nous projetons aussi de mener des campagnes payantes sur les réseaux sociaux. Le site d’Arthaud, qui reste indépendant de Liréka, va être retravaillé. Le but, c’est de développer la marque localement et de l’ancrer sur le territoire grenoblois alors que Liréka vise l’international.
 

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