L'auteur de L'Immortalité, de La Plaisanterie ou encore de L'Insoutenable légèreté de l'être, publié par Gallimard, est décédé mardi 11 juillet à Paris, à l'âge de 94 ans. L'écrivain tchèque naturalisé Français était entré dans la Pléiade en 2011.
Par
Pierre Georges
avec AFPCréé le
12.07.2023
à 11h22, Mis à jour le 13.07.2023 à 14h15
L'écrivain tchèque Milan Kundera est décédé mardi 11 juillet à Paris, à l'âge de 94 ans, a annoncé mercredi 12 juillet son éditeur Gallimard dans un communiqué. La porte-parole de la Milan Kundera Library, dans sa ville natale de Brno a confirmé l'information à l'AFP.Il était l'un des romanciers de langue française les plus influents au monde.
Milan Kundera est notamment l'auteur de La plaisanterie (Gallimard, 1968), Risibles amours (Gallimard, 1970), La vie est ailleurs (Gallimard, 1973), récompensé du prix Médicis étranger, La valse aux adieux (Gallimard, 1976) et L'insoutenable légèreté de l'être (Gallimard, 1984). Peintre sarcastique de la condition humaine, il était l'un des rares auteurs à être entré de son vivant dans les prestigieuses éditions de La Pléiade, en 2011.
Né à Brno, dans l'actuelle République tchèque, le 1er avril 1929, destiné comme ses parents à une carrière de musicien, Milan Kundera fut d'abord un romancier mélomane. Ses premiers textes, des poèmes rédigés en tchèque, sont composés comme des sonates. Proche du régime communiste, il s'en éloigne assez vite sans pour autant devenir un dissident.
Lorsqu'il était encore tchécoslovaque, Milan Kundera a publié deux romans, La Plaisanterie (achevé en 1965 et publié plus tard, salué notamment par Aragon) et Risibles amours (1968), des textes dressant un bilan amer des illusions politiques de la génération du coup de Prague qui, en 1948, permit l'arrivée au pouvoir des communistes.
Mis à l'index dans son pays après l'écrasement du mouvement réformateur du Printemps de Prague par les chars soviétiques, Kundera s'exile en 1975 en France avec sa femme Vera, présentatrice vedette de la télévision tchèque. Les autorités tchécoslovaques lui ont retiré sa citoyenneté à la suite de la publication du Livre du rire et de l'oubli en 1979 (Gallimard, traduction de François Kerel), où il avait qualifié le président tchécoslovaque de l'époque, Gustav Husak, de "président de l'oubli".
Grave et désinvolte
Naturalisé français, il choisira dès lors le français comme langue d'écriture, pour marquer sa rupture avec un pays natal qui l'a déchu de sa nationalité en 1979. Il interdit la traduction dans sa langue maternelle des livres qu'il avait écrits en français, ce qui lui a valu de nombreuses critiques dans son pays natal.
En France, il publie La Valse aux adieux, Le Livre du rire et de l'oubli... En 1984, paraît ce que d'aucuns considèrent comme son chef-d'oeuvre, L'Insoutenable Légèreté de l'être, roman d'amour et ode à la liberté, tout à la fois grave et désinvolte, dont le sujet n'est rien moins que la condition humaine. Le livre sera adapté au cinéma en 1988, avec Juliette Binoche et Daniel Day-Lewis.
Analyste de son propre travail, il a notamment signé en 1986 L'Art du roman.
Il y explique qu'"en entrant dans le corps du roman, la méditation change d'essence. En dehors du roman, on se trouve dans le domaine des affirmations, tout le monde est sûr de sa parole: un politicien, un philosophe, un concierge... Dans le territoire du roman, on n'affirme pas: c'est le territoire du jeu et des hypothèses".
Dans La Fête de l'insignifiance (2014), par la voix d'un de ses personnages, il poursuivait sa réflexion à l'aune de son œuvre: "Nous avons compris depuis longtemps qu'il n'était plus possible de renverser ce monde, ni de le remodeler, ni d'arrêter sa malheureuse course en avant. Il n'y avait qu'une seule résistance possible: ne pas le prendre au sérieux".
En 2019, il avait reçu la citoyenneté tchèque, 40 ans après avoir été déchu de sa nationalité tchécoslovaque par le régime communiste.
S'abstenant de s'exprimer dans les médias, souhaitant qu'on parle de son oeuvre et de rien d'autres, Kundera vivait discrètement autour de la rue du Cherche Midi, dans le VIe arrondissement de Paris, avec sa femme Vera.
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