Cinéma

Philippe Jaenada juré spectateur du Champs-Elysées Film Festival

Philippe Jaenada. - Photo Laurence Reynaert

Philippe Jaenada juré spectateur du Champs-Elysées Film Festival

Membre du jury du 5e Champs-Elysées Film Festival qui s'ouvre ce mardi 7 juin, l'écrivain Philippe Jaenada évoque son rapport avec le 7e art, les adaptations et l'avantage d'être un juré "hors milieu".

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Par Vincy Thomas
Créé le 07.06.2016 à 19h58

Le 5e Champs-Elysées Film Festival, seule manifestation cinématographique d’ampleur de la capitale en été, s’ouvre le 7 juin pour s’achever le 14, avec une nuit dédiée aux adaptations des romans de Philip K. Dick le 10 juin. Au jury cette année, présidé par Nicole Garcia , qui vient d’adapter le roman de Milena Agus Mal de Pierres (Liana Levi, Le Livre de poche), et Alexandre Aja, qui s’apprête à tourner l’adaptation du roman de Liz Jensen, La neuvième vie de Louis Drax (NIL, J’ai lu), on retrouvera la réalisatrice Sophie Letourneur, les comédiens Déborah François, Zita Hanrot, Vincent Rottiers et Felix Moati, et un écrivain, Philippe Jaenada.
 
L’auteur de La petite femelle a accordé un entretien à Livres Hebdo, dans son QG, un bistro de la rue Lafayette à Paris, loin des chics Champs-Elysées.
 
Livres Hebdo : Pourquoi avoir accepté, pour la première fois, d’être juré d’un festival de cinéma ?
Philippe Jaenada : J’ai accepté pour deux raisons. Les films indépendants m’intéressent (la compétition est composée uniquement de productions hors studios hollywoodiens, ndlr) et Nicole Garcia me l’a demandé. On ne se connaît pas depuis longtemps mais nos liens sont forts. Je n’ai donc pas pu lui refuser. Je ne savais pas alors que le planning était aussi chargé…
 
LH : On pourrait croire que vous êtes connaisseur en cinéma puisque vous avez commencé en étudiant le 7e art.
PJ : J’ai fait des études de cinéma un peu par hasard, à l’ESRA (Ecole Supérieure de Réalisation Audiovisuelle, ndlr). Ça m’a ouvert sur la culture. Mais il a fallu faire un stage et je suis tombé dans une boîte de pub. Devant tant de cynisme, j’ai préféré tout plaquer. Mais c’était mon premier pas dans mon univers actuel, artistique et culturel.
 
LH : Quel genre de films aimez-vous ? Est-ce que le cinéma compte dans votre inspiration ?
PJ : Je ne vais presque plus au cinéma mais je vois beaucoup de films chez moi. J’aime un peu tout, y compris des films d’action. Le cinéma français m’intéresse peut-être un peu moins. John Cassavetes reste une référence du même ordre qu’une référence littéraire. Cependant, je reste spectateur. Je n’ai jamais écrit un scénario. On fait souvent une sorte de confusion parce qu’on dit que mes livres sont écrits de manière cinématographique. Mais mes romans sont le contraire d’un scénario. Il y a très peu de dialogues dans mes livres.
 
LH : Un seul de vos romans, le premier, Le chameau sauvage, a été transposé sur grand écran. Vous semblez réticent face à l’idée d’être adapté.
PJ : C’est vrai, je n’aime pas qu’on adapte mes livres. Je n’étais pas à l’aise à la sortie d’A + Pollux. Comme le film a été un échec, les gens peuvent lire Le chameau sauvage sans avoir la tête de Cécile de France et Gad Elmaleh en tête. Car une adaptation c’est un mec qui impose sa vision des choses alors que chaque lecteur a la sienne des personnages, des images, du ton, des décors. Je rêverai de lire Maigret sans voir la tête de Jean Richard ou Bruno Cremer. Je n’ai jamais pu lire 37°2 le matin normalement parce que j’avais vu le film avant et les visages de Béatrice Dalle et Jean-Hugues Anglade parasitaient ma lecture. Je trouve que l’adaptation tue le livre. Evidemment il y a l’aspect financier, c’est indéniable. Après Le Chameau sauvage, j’ai refusé toutes les propositions. Mais depuis deux livres, je ne raconte plus ma vie mais celle des autres. Ils sont en train de préparer un film sur Bruno Sulak, d’après mon livre Sulak. C’est un personnage réel, sa famille est vivante, donc là je ne peux pas refuser.
 
LH : Que pensez-vous apporter comme juré ?
PJ : On va me demander mon avis de spectateur. Je suis un spectateur comme les autres, mais j’ai l’avantage d’être au jury. Là, c’est très différent que d’être juré dans des prix littéraires. C’est un peu dérangeant de juger des gens du même secteur que soi. Ça fausse un peu les choses. Récemment, j’ai eu l’expérience avec le Prix Orange du Livre où les jurés professionnels avaient deux choix très clairs et notamment La Grande Arche de Laurence Cossé. Finalement, le seul qui avait un avis un peu décalé par rapport à nous, c’est un comédien, Hippolyte Girardot, qui avait sa sensibilité propre. Les lecteurs n’ont pas fait le même choix. Peut-être qu’ils avaient une simple vision de lecteurs et que notre jugement était plus orienté sur la qualité littéraire et le style. C’est ça qui est intéressant d’ailleurs. Tout ça pour vous dire qu’en étant un écrivain, je vais avoir un regard différend de celui des acteurs et réalisateurs du jury.

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