2 mars > Essai France

Ah, les ronds-points… Le rêve des élus locaux et du 1 % culturel avec ses statues moches et ses massifs de plantes criardes ! Mais en quoi est-ce philosophique ? Jean-Michel Espitallier se lance dans l’aventure. Car ce penseur est en fait un poète. Auteur de livres inclassables (L’invention de la course à pied (et autres trucs), Al Dante, 2013) et d’anthologies tout aussi singulières (Caisse à outils, Pocket, 2006, Pièce détachées, Pocket, 2000), ce personnage tout droit sorti du cabaret du Chat noir cher à Alphonse Allais se propose de nous expliquer l’art d’aborder les ronds-points pour ne pas penser en rond.

Dans la réalité, ces carrefours giratoires servent à ralentir l’automobiliste. Au sens figuré, ils nous incitent aussi à lever le pied dans un raisonnement. Pour éviter les sorties de route ? Pas du tout. Juste pour fluidifier le mouvement. Belle image de la société qui promeut la liberté de circulation en aménageant des ralentissements. Après tout, on n’entre dans un rond-point que pour en ressortir. Car comme le souligne l’auteur dans un bel élan d’anthropologie routière : "Si un rond-point sans sortie était un cauchemar, un rond-point sans entrée serait une énigme."

Dans ce traité de philosophie joliment absurde, Jean-Michel Espitallier se pose en Deleuze décortiquant le Code de la route ou en Derrida déconstructeur de travaux publics. C’est assez dadaïste, légèrement fumiste et sacrément ironique, une sorte d’exercice de style férocement réjouissant. En tout cas, après la lecture de ce petit livre malin qui n’y va pas par quatre chemins, vous n’aurez plus le même point de vue sur les ronds-points. L. L.

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