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Provocations et apologies sont au menu de l’édition 2015 de l’éternel débat sur la liberté d’expression et ses limites, faisant soudainement se côtoyer les pitoyables ou terrifiants pro-Coulibaly et le grand écrivain italien Erri de Luca.

L’apologie du terrorisme devenue, depuis la loi du 14 novembre 2014 sur « la lutte contre le terrorisme », un délit propre au Code pénal, avec des sanctions renforcées. Cette infraction était jusqu’alors visée au sein de la célèbre loi du 29 juillet 1881.

L’article L. 421-5 du Code pénal dispose ainsi désormais que « le fait de provoquer directement à des actes de terrorisme ou de faire publiquement l'apologie de ces actes est puni de cinq ans d'emprisonnement et de 75 000 € d'amende.

Les peines sont portées à sept ans d'emprisonnement et à 100 000 € d'amende lorsque les faits ont été commis en utilisant un service de communication au public en ligne. 

Toutefois, « lorsque les faits sont commis par la voie de la presse écrite ou audiovisuelle ou de la communication au public en ligne, les dispositions particulières des lois qui régissent ces matières sont applicables en ce qui concerne la détermination des personnes responsables. »
Quant au romancier Erri De Luca, il encourt jusqu’à cinq ans de prison pour avoir incité au sabotage du chantier ferroviaire Lyon-Turin de la TAV, en septembre 2013, et en particulier dans une interview accordée à l’édition italienne du Huffington Post. Lors de la première audience, le 28 janvier dernier, l’auteur a insisté : « Le verbe saboter est noble ! Gandhi lui-même l'a utilisé », tandis que le procureur ajoutait que le terme saboter désignait bien la destruction de biens.

Erri de Luca vient de publier La Parole contraire (Gallimard), dans lequel il affirme revendiquer « le droit d'utiliser le verbe "saboter" selon le bon vouloir de la langue italienne » La prochaine audience a été fixée au 16 mars.

Pour revenir, avec ou sans tunnel, de ce côté des Alpes, les délits de provocation ou d’apologie sont très nombreux en droit français, et s’appliquent en particulier aux médias et à l’édition de livres. 

Ils sont pour la plupart visés dans la loi du 29 juillet 1881 dite « sur la liberté de la presse » et sont pénalement réprimés, de façon générale, à la condition d’avoir été suivis d’effet. En clair, il est nécessaire que l’écrit litigieux ait entraîné la commission d’actes prohibés.

De multiples types de provocations

En revanche, l’article 24 de la même loi n’exige pas, dans le cas de certaines provocations, qu’elles aient été suivies d’effet pour que leurs auteurs soient poursuivis. Il s’agit des provocations au vol, au meurtre, au pillage, à l’incendie, aux crimes et délits contre la sûreté de l’État. Il en est de même des provocations à d’autres infractions visées aux articles 222-6 à 222-16 (qui concernent notamment les « violences ») et 322-6 (relatives en particulier aux « destructions, dégradations et détériorations dangereuses pour les personnes ») du Code pénal, parmi lesquelles se trouve le viol.

Sont également répréhensibles, selon le même texte, la simple apologie des crimes et délits spécifiques, ainsi que celle des crimes de guerre, des crimes contre l’humanité ou crimes et délits de collaboration avec l’ennemi. Enfin, l’article 24 vise encore les provocations « à la discrimination, à la haine ou à la violence à l’égard d’une personne ou d’un groupe de personnes à raison de leur origine ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée », que ces provocations soient suivies d’effet ou non.
L’article 25 de la loi de 1881 sanctionne ainsi les provocations visant les militaires « dans le but de les détourner de leurs devoirs militaires et de l’obéissance qu’ils doivent à leurs chefs dans tout ce qu’ils leur commandent pour l’exécution des lois et règlements militaires »…

De même, les articles premier de la loi du 28 juillet 1962 et 20 et 21 de la loi du 6 juillet 1966 visent les « provocations à la désobéissance des assujettis au service de la Défense et des jeunes gens affectés au service de la coopération et de l’aide technique ». L’article 476-3 du Code de justice militaire concerne la provocation de « militaires et marins à passer au service d’une puissance étrangère » et la participation à une « entreprise de démoralisation de l’armée ».

Certains articles du Code pénal s’appliquent également à d’autres provocations relevant du domaine militaire puisqu’on y trouve, à l’article 411-11, la provocation à la trahison et à l’espionnage, à l’article 413-1, la provocation à passer à l’ennemi, à l’article 413-3, la provocation à la désobéissance, et à l’article 413-4, la provocation à une entreprise de démoralisation de l’armée !

Le même code vise par ailleurs les provocations aux attroupements (article 431-6) et à l’abandon d’enfants (article 227-12).
Quant au Code de la santé publique, il réprime, en ses articles 647 à 649, la provocation à l’avortement, tandis que l’incitation au refus collectif de paiement de l’impôt est visée par l’article 1747 du Code général des impôts.

L’article 3 de la loi du 1er août 1905 concerne la provocation à l’usage des denrées falsifiées ; la loi du 18 août 1936, dans son ensemble, la provocation à des actes portant atteinte au crédit de la Nation et l’article 35 de la loi du 9 décembre 1905, la provocation par les ministres du culte à la résistance aux lois.

La provocation au suicide et celle à l’usage des stupéfiants ont été souvent évoquées ces dernières années à l’encontre de diverses publications. Rappelons que c’est une loi du 31 décembre 1987, adoptée en réaction au livre Suicide mode d’emploi qui a instauré, en droit français, le délit de provocation au suicide.

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