Avant-portrait > Valeria Luiselli

Sa vie est un éternel voyage. Née au Mexique, Valeria Luiselli parcourt le monde depuis son plus jeune âge. L’atypisme de ses parents l’a conduite à se sentir "en décalage, tant ils [lui] ont transmis une conscience politique aiguë". Sa mère a milité dans la jungle mexicaine, avant de rejoindre son père dans des ONG. Ce dernier est ensuite devenu diplomate. "Nous sommes arrivés en Afrique du Sud quand Mandela venait d’être élu", se souvient-elle. Vient ensuite la Corée du Sud, puis l’Inde.

Cosmopolite

"On parlait anglais à l’école, une langue que je ne maîtrisais pas. Pour ne pas être perdue, je me suis mise à griffonner des petites histoires." La jeune fille devient polyglotte et cosmopolite, mais reste habitée par "un sentiment fantomatique. Naviguant en permanence entre les langues et les contrées, j’ai découvert la diversité culturelle mondiale. L’identité me semble si fluide, que mon appartenance se situe partout et nulle part."

Frustrée et enragée

Désormais installée à New York, Valeria Luiselli a connu le parcours du combattant pour obtenir sa "green card". Son dossier "se perd dans les limbes administratifs". On lui propose alors de servir d’interprète auprès des tribunaux américains, chargés d’étudier le cas des enfants migrants hispanophones. Une expérience relatée dans un texte à paraître au sein de la nouvelle collection de L’Olivier, "Les feux", qui met en avant "des essais, des récits, des interventions, des rêveries, des mémoires qui contribuent à éclairer notre époque". La politique migratoire américaine est un miroir de "nos sociétés, engluées dans des pratiques sécuritaires, niant les droits humains. Notamment celui de fuir des conditions de vie déplorables pour aspirer à un avenir meilleur."

Valeria Luiselli ressort de cette expérience bouleversée, frustrée et enragée. Son moyen d’action reste de donner une voix à ces enfants confrontés à une bureaucratie sans merci. "Cela ne réparera pas leurs vies brisées, mais permettra de montrer le destin humain derrière des chiffres impersonnels." La plupart d’entre eux errent dans un no man’s land administratif. Un entre-deux que comprend bien Valeria Luiselli. "Je tiens à créer des ponts entre les cultures, or il y a clairement un lien entre l’écriture et mon éternelle impression d’aliénation. Chassant les préjugés, mes livres nous poussent hors de nos frontières habituelles, pour mieux saisir la complexité de l’Autre." Kerenn Elkaïm

Valeria Luiselli, Raconte-moi la fin, L’Olivier, traduit de l’anglais (états-Unis) par Nicolas Richard, Prix: 14,50 €, 125 p., tirage: 5 000 ex., sortie: 5 avril, ISBN: 978-2-8236-1241-7

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