Avant-critique Roman noir

Adoubés par Stephen King, les livres de Stephen Graham Jones rallieraient volontiers les rayonnages « Imaginaire » ou « Horreur » si leur auteur n'était cette herbe folle aussi inclassable que ses productions. Né Blackfeet dans une de ces réserves indiennes en friche, professeur d'anglais à l'université du Colorado, il raconte son peuple comme d'autres fracassent des cibles au stand de tir, dans la rue à l'occasion ou dans les sous-bois. Il est d'ailleurs question de chasse ici : point de départ d'un présent noir et d'hallucinations mortifères. Harcelés par une jeune femelle caribou dont ils ont jadis décimé la harde, quatre amis d'enfance pataugent entre leurs cauchemars et un horizon passablement bouché par leur chiche condition amérindienne. Ricky ne fait pas de vieux os. Lewis, en bon facteur, sonne plusieurs fois le rappel des potes. Mais rien ne peut arrêter le toboggan vers l'enfer, vers la résurrection du monstre. Folie et carnage savonnent les planches d'où glisse chaque protagoniste vers les tréfonds de son inéluctable fin. Alors que la qualification aléatoire d'« imaginoire » peut aider à définir le magistral chambard, celui-ci dérivera jusqu'à l'affrontement final entre une descendante du quatuor éradiqué et son adversaire mi-femme mi-caribou, le tout en un impensable match de basket épique et trash. Dément et enragé !

De salves sanglantes en étincelles cocasses, Stephen Graham Jones ouvre une piste inédite au cœur des noirceurs américaines : un obligé sommet de fiction pulp et chamanique.

Stephen Graham Jones
Un bon Indien est un Indien mort Traduit de l'anglais (États-Unis) par Jean Esch
Rivages
Tirage: 8 000 ex.
Prix: 23 € ; 352 p.
ISBN: 9782743656218

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