Livres Hebdo : Votre vitrine a été vandalisée dans la nuit du 14 au 15 novembre, en raison de la venue de Francesca Albanese, rapporteuse spéciale de l'ONU sur les droits humains dans les territoires palestiniens occupés. Le 21, la mairie de Paris vous a refusé ainsi qu’à 39 autres librairies indépendantes, une subvention (500 000 euros en tout) permettant d’améliorer l’accès à vos espaces et d’en réduire l’empreinte environnementale. Faites-vous un lien entre ces deux événements ?
Alexis Argyroglo : Bien évidemment oui. Et même plus largement, on aurait tort d’isoler les cas de violences contre les librairies. C’est un continuum du vandalisme à la violence politique, du tag, du bris, des serrures sabotées aux pressions d’élus. C’est une forme de fascisme ou de protofascisme : il s’agit d’anéantir l’autre, en commençant par sa parole. Mais cette avancée de l’extrême droite, de plus en plus documentée, va bien au-delà de la librairie.
À quoi comptiez-vous dédier cette aide ?
A.A. : L’appel à projet de la ville de Paris portait sur deux types de travaux. L’énergie et la réduction des empreintes carbone : lumière, chauffage… l’autre était pour les accès à la mobilité réduite. Nous comptions installer une rampe d’accès à l’entrée pour franchir la marche. Aujourd’hui on ne peut le faire qu’au cas par cas mais ce n’est pas idéal. Il faut espérer que, comme il en est question, le vote aura lieu à nouveau en décembre et que chacune des 40 librairies pourra en bénéficier.
« Plus que jamais il nous faut creuser le sillon de l’intelligence et du partage »
Vous appartenez au collectif les Désirables ainsi qu’au réseau Paris librairies. Avez-vous prévu de réagir ?
A.A. : Avec Les Désirables pas encore, même si beaucoup de soutiens à titre individuel se sont exprimés. De la part de nos clients aussi. Rien que ce dimanche matin, en sortant du marché. On nous a même offert des chocolats ! Paris librairies devrait faire un communiqué lundi. Avec des confrères on réfléchit peut-être à compléter celui-ci une fois que nous l’aurons lu.
Ces événements vont-ils influer sur votre programmation dans les temps à venir ?
A.A. : Bien évidemment non. Plus que jamais il nous faut creuser le sillon de l’intelligence et du partage. Nous préparons une rencontre autour de deux recueils de poésie parus chez Héros-Limite, de Marina Skalova et Laura Tirandaz. Ensuite nous accueillerons Hortense Belhôte au Seuil pour Sortez du cadre ! et le 2 décembre Éric Fassin et Joana Maso viendront présenter L’Art c’est la vie qu’ils font paraître aux éditions Macula. Et, parmi nos grands projets, nous préparons la 4e édition du festival Byzance ! qui porte sur l’économie dans les domaines croisés de l'art, de la littérature et des sciences sociales. Avec à chaque fois un angle. Après Gestes-dons-présences, Bijoux-parures-choses précieuses et Banques-butins-trésors, en 2026 ce sera Successions-héritages-transmissions.
