All about Eve. Ce sont poussières d'étoiles que vent emporte. Los Angeles 1938, la Mecque du rêve en celluloïd fonctionne à plein régime. On sait depuis Fitzgerald et Budd Schulberg que l'autre côté du paradis est peuplé parfois d'étranges pèlerins. Ainsi cette jeune blonde à la langue bien pendue qui pourrait n'être qu'une des prétendantes à l'esclavage de la gloire et qui va se révéler tout autre chose. Une fille différente. D'abord elle boîte et puis son visage, à bien y regarder, s'orne d'une longue cicatrice de sa joue à son menton. Elle s'appelle Evelyn Ross dite « Eve », vient probablement du Midwest. Un jour, elle a pris un train à New York qui devait la ramener à Chicago, mais a décidé brusquement, et sans raison apparente, de poursuivre son chemin jusqu'à la Californie et aux mirages d'Hollywood. Depuis, avec une élégante lassitude, elle traîne son absence d'illusions des hôtels de Beverly Hills aux clubs de jazz de Central Avenue, et jusqu'au plateau de tournage du film le plus attendu du moment, Autant en emporte le vent. Car voilà, au fil de ses pérégrinations, Eve a rencontré celle dont David O. Selznick voudrait bien faire la petite fiancée de l'Amérique, Olivia de Havilland. Les deux jeunes femmes vont nouer une amitié sincère et néanmoins pas tout à fait désintéressée, puisqu'Eve est chargée par la Warner de chaperonner et, au besoin, de protéger l'actrice des écueils, nombreux, qui pourraient se dresser sur la route de la gloire.
L'argument d'Eve et Hollywood, qui voisine avec celui des films Une étoile est née ou Ève, peut paraître rebattu. Pourtant, il suffira de dire qu'il s'agit d'un roman du toujours délicieux Amor Towles pour que les lecteurs des Règles du jeu (Albin Michel, 2012) − dont Eve Ross était déjà un personnage − ou d'Un gentleman à Moscou (Fayard, 2018) soient tout à fait rassurés. Ici aussi, comme à l'accoutumée, le romancier américain déploie des trésors d'élégance et d'humour. Ainsi qu'une discrète érudition sur ce moment, avant que la guerre puis la télévision ne viennent bousculer tout cela, où Hollywood et les studios pouvaient à bon droit prétendre régner sur le monde puisqu'ils régnaient sur son imaginaire. Ce moment aussi où les femmes étaient fatales et d'abord pour elles-mêmes...
Eve et Hollywood
Flammarion
Traduit de l'anglais (États-Unis) par Nathalie Cunnington
Tirage: 6 000 ex.
Prix: 22 € ; 320 p.
ISBN: 9782080479679