Jeunesse

Elsa Kedadouche : "A travers l’édition, nous voulons banaliser la différence"

Caroline Fournier et Elsa Kedadouche, fondatrices de On ne compte pas pour du beurre - Photo Chrystel Jaubert

Elsa Kedadouche : "A travers l’édition, nous voulons banaliser la différence"

Pour la sortie le 14 janvier de deux nouveaux titres, la cofondatrice de la maison jeunesse On ne compte pas pour du beurre revient sur sa ligne éditoriale engagée en faveur des droits LGBTQ+ et des personnes racisées.

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Par Dahlia Girgis
Créé le 04.01.2022 à 15h00

Un enfant préoccupé par des débats philosophiques aux côtés de ses deux papas, Marc et Kris ou encore Lila qui se bat pour l'environnement près de ses deux mamans. Ces intrigues sont celles des deux titres publiés le 14 janvier par la maison On ne compte pas pour du beurre : Hic et Nunc Pareils et différents de Elsa Kedadouche avec les illustrations de Elodie Maulucci; Une aventure de Lila. La vallée du miel de Caroline Fournier avec les dessins de Carolane Storm

Les deux autrices, Elsa Kedadouche et Caroline Fournier sont les deux fondatrices de la maison, lancée en août 2020 à Strasbourg. Les ouvrages destinés aux enfants de la maternelle à la primaire (3-8 ans) défendent une ligne éditoriale en faveur des droits LGBTQ+ et des personnes racisées. Elsa Kedadouche nous détaille sa vision du métier.

La question LGBTQ+ ou les autres thèmes ne sont jamais au centre de l’intrigue…
Les personnages LGBTQ+ ou racisés sont peu représentés dans la littérature jeunesse ou sinon ils sont souvent le sujet de l'intrigue. Le fait que ce ne soit pas central est très très rare. C’est ce qui nous manque, et nous voulons être à cet endroit-là. Nous n'avons pas envie d'expliquer à nos enfants qu'avoir deux mamans c’est normal, nous avons envie que ça existe tout simplement. Idem pour les personnes racisées, s'ils sont mis en avant c'est souvent en lien avec une problématique négative. Nous avons envie de prendre le contre-pied de cette réalité à travers des personnages positifs. Dans L’amoureuse de Simone (à paraître le 3 mars), le sujet principal c’est l’amour. Faire ces livres est important pour que les enfants se projettent ou pour qu’ils sachent que ça existe.

Avez-vous des inquiétudes par rapport à la réception de certains prescripteurs ? 
Nous abordons des sujets qui ne sont pas assez représentés dans la littérature jeunesse : thématique LGBT+, personnes racisées ou avec des handicaps. Face à ces sujets, nous avons deux types de rencontres. D’une part, les personnes engagées qui sont heureuses de voir ces représentations. D’autre part, les personnes frileuses. Au salon de Montreuil où nous avions un stand, nous avons rencontré des libraires et bibliothécaires qui avaient un mouvement de recul quand ils comprenaient notre ligne. Certains, bien qu'intéressés par nos sujets, nous ont dits que ce que nous faisions était bien car le traitement des sujets "était assez discret". Une forme évidente d’homophobie pour nous. Pour autant, nous ne voulons pas faire de la pédagogie. L’objet principal dans le statut de notre association c’est la lutte contre la discrimination. A travers l’édition, nous voulons banaliser tout simplement “la différence”. 

Comment est née On ne compte pas pour du beurre ? 
Nous sommes une famille homoparentale à la recherche de livres pour notre fille. Des ouvrages avec des familles qui ressemblent à la nôtre. Il en existe très peu, et ceux dont ce n’est pas le sujet principal, encore moins. A l’aide d’une campagne Ulule qui a réuni 20 000 euros, nous avons monté en août 2020 l’association On ne compte pas pour du beurre. Au nombre de neuf adhérents bénévoles, dont trois très actifs, nous allons publier environ 7 titres par an. Les deux premiers sont sortis en août 2021 avec des textes écrits par nous-mêmes. A terme nous souhaitons développer une politique d’auteurs, car nous avons plus envie d’être éditrices qu' auteures.

Quel sera votre politique pour le choix des auteurs ?
Nous cherchons en priorité des auteurs et illustrateurs concernés par le sujet et avec des univers graphiques qui nous plaisent. Pour nous, il est juste et important de mettre en avant des auteurs d’abord touchés par ces problématiques. Il faut leur donner de la place, ce sont souvent des personnes qui ont peu de chances d’être repérées en raison entre autres des discrimination intériorisées.

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