Parc des Expositions, dimanche 6 juillet à 16h. Dans quelques heures, l’ensemble de bâtiments de 242 200 m² perdra ses lampions de papier, ses cerisiers en fleurs artificiels et surtout ses longs rubans de stands, marquant la clôture de la 24^e édition de la Japan Expo.

Les festivaliers n’ont plus beaucoup de temps pour découvrir l’exposition honorant Junji itô, qui avait fait le déplacement le temps d’une masterclass et de plusieurs sessions de dédicaces. Le mangaka est revenu sur le devant de la scène en France grâce à l’effort conjoint des réseaux sociaux, où l’on apprécie son esthétique horrifique, et Mangetsu, collection de Bragelonne qui a réédité ses ouvrages en français alors qu’ils étaient devenus presque introuvables.  

Sorti en 2021, « Tomié est celui qui a le plus déchaîné les passions, indique Anaëlle Neige, chez Mangetsu. Nous le faisons reparaître en poche à l’occasion de sa venue à Paris. » Le manga s’est écoulé à 700 457 exemplaires. Pour autant, l’éditrice ne voit pas dans cette popularité le développement d’une passion française pour le manga vintage. Du moins, pas du côté du grand public.

Le manga vintage : une niche modeste, mais qui perdure

Chez Akata, l’éditeur actuel de Moto Hagio, invitée d’honneur du Festival d’Angoulême en 2024, le son de cloche est le même : « C’est une niche. C’est rare qu’une personne arrive sans connaître ces auteurs et se tourne vers eux spontanément », indique Thomas, libraire d’une enseigne spécialisée. À ce jour, c’est le premier volet du Clan des Poe qui s’est le mieux vendu dans le catalogue, à près de 3 000 exemplaires.

Et pourtant, le vintage n’est pas mort. Un parfum de nostalgie a flotté dans l'air tout au long de cette Japan Expo 2025. Parfum de nostalgie aussi et de bougies d’anniversaire, soufflées par un robot qui fêtait son 50^e anniversaire. Goldorak a ainsi fait l’objet de nombreux évènements au sein de la manifestation et en dehors – par le biais, notamment, d’une exposition à Châtelet-les-Halles –, mais aussi de deux éditions intégrales collector chez Isan manga, prévues pour le 3 octobre.

« On nous a dit, au dernier moment, que le président allait passer, et on a pensé que c’était une blague »

Par son statut d’œuvre culte, Dragon Ball Z, au même titre que Pokémon, n’est jamais négligée en convention, où les produits dérivés sont rois. Mais son omniprésence a pour de nombreux amateurs de mangas quelque chose de doux-amer depuis le décès de son créateur, Akira Toriyama, le 1^er mars 2024.

Pléthore d’invités étaient conviés à cette 24^e édition pour lui rendre hommage : l’éditeur Kazuhiko Torishima, Katsuyoshi Nakatsuru, animateur et character designer de l’anime à ses prémisses, et puis, côté français, Brigitte Lecordier, doubleuse de Goku.

Avec la légende Kazuhiko Torishima qui nous fait l’honneur de sa présence à la Japan Expo. Vive la culture qui nous rapproche ! pic.twitter.com/xi2aH9HWAf

— Emmanuel Macron (@EmmanuelMacron) July 3, 2025

Mais une autre surprise attendait les festivaliers jeudi matin… ainsi que les créateurs du festival. Son co-fondateur, Thomas Sirdey, raconte à Livres Hebdo : « On nous a dit, au dernier moment, que le président allait passer, et on a pensé que c’était une blague. Et puis, on a vu la délégation. » Emmanuel Macron, qui avait, à la mort d’Akira Toriyama, été le premier chef d’État à lui rendre hommage en ligne, a en effet effectué le déplacement.

« Il est allé saluer quelques éditeurs français comme Glénat et Kana, mais s’est surtout attardé sur le stand de Dragon Ball Z, où il a pu rencontrer Kazuhiko Torishima. J’ai trouvé ce moment intense, et très sincère. C’est la première fois qu’on a une présence politique aussi importante, et c’est une preuve que notre évènement a gagné en légitimité, fort de notre grand âge ! » Le président de la République a été immortalisé aux côtés de l’équipe, en train de faire un Kaméhaméha, le mouvement signature de DBZ.

Des liens naissants

La 24^e édition de la Japan Expo a également été l’occasion, pour la plateforme Allskreen, d’annoncer sa nouvelle collaboration avec Albin Michel lors d’une conférence sur le transmédia. Trois séries intègrent son catalogue webtoon : Œil de Dragon, Manon Stremon et Monstres 13, un process qui n’a duré que quelques mois : « C’est un marché de patience mais à l’exécution rapide, estime Flore Piacentino, éditrice BD chez Albin Michel. Un avantage que détient la bande dessinée moderne, c’est que les titres peuvent être transmis plus vite à Allskreen et adaptés rapidement, un épisode peut se faire en un jour seulement. Nous avons aussi beaucoup échangé avec les auteurs, qui étaient soucieux que ces adaptations se fassent en France par des connaisseurs, et non des IA. »

Après une conférence de clôture ouverte au public et quelques activités, les participants de cette édition repartent en RER, la tête pleine de souvenirs, et les sacs pleins de mangas, ce qui ne manquera pas d’alimenter leur « tsundoku », ce mot japonais désignant le fait d’accumuler des livres à lire. Un communiqué annonçant le taux de fréquentation du festival sera diffusé dans les mois à venir.