Avant-portrait > Sébastien Meier

En 2014, Sébastien Meier publiait chez Zoé, exigeante maison littéraire helvétique, son premier roman, Les ombres du métis, estampillé "noir". Ce n’était pas son premier texte. Il avait déjà commis quatre romans, dans des genres divers, qu’il avait préféré garder pour lui. "Ce que je voulais faire depuis toujours, c’était écrire", explique le jeune auteur. "Je ne me suis pas dit : "Je vais écrire un polar." C’est mon éditrice, Caroline Coutau, qui m’a poussé dans ce sens." ça a marché. Le livre obtient le prix des Lecteurs de la ville de Lausanne 2015, et se vend à 2 000 exemplaires.

Sébastien Meier enchaîne avec la suite, Le nom du père (2016), une enquête sur le business des matières premières, dont la Suisse est la plaque tournante, puis L’ordre des choses, paru en 2017. "Ce rythme me convient bien. Ecrire tous les jours, c’est mon métier", dit-il. Mais un doute s’est installé en lui. Chez Zoé, il était le seul auteur de polars, et la maison ne comptait pas développer une collection dédiée. S’il voulait franchir un cap, il lui fallait toucher le marché français, où les genres littéraires sont plus cloisonnés qu’en Suisse.

Androgynie

Aussi, lorsque Marie Eugène, éditrice chez Fleuve éditions, l’approche au festival Quais du polar 2016 à Lyon, accepte-t-il sa proposition après en avoir informé Zoé. Voilà Sébastien Meier installé chez un grand éditeur spécialisé "polar", pour une nouvelle trilogie romanesque, située dans un pays imaginaire, la Bohème, qui ressemble quand même furieusement à la Suisse, au bord de la crise. Le héros, Elias Neuman, est, à la ville, un courageux journaliste lanceur d’alerte et, à la scène, danseur queer dans un cabaret gay. Le point de départ des Casseurs d’os, c’est le meurtre sauvage d’une historienne et de son assistant, entrés en possession, apparemment, de secrets fort compromettants pour la classe politique bohémienne. "Toute ressemblance avecdes pays réels n’est évidemment pas fortuite", s’amuse l’auteur. Les deux autres tomes devraient paraître en avril 2019, puis avril 2020. Concernant son personnage, l’auteur "joue sur l’androgynie, l’ambiguïté. C’est un acte politique, qui veut dénoncer le sexisme de base, anti-queer, même dans les milieux gays." Alors, afin d’être en cohérence avec son propos, il assurera la promotion du livre, salons, rencontres, interviews, travesti comme Elias le soir, quitte à surprendre, voire choquer.

Après, il compte partir vivre en Espagne, à Séville, là où se danse un flamenco des plus purs, qu’il apprend depuis des années déjà. "Je voudrais danser la bulería, la danse qui fait peur à tout le monde." Et de se lancer dans des explications techniques sur les pas, les phrases musicales, en parfait aficionado.

Tout gosse, Sébastien Meier, issu de familles d’imprimeurs, est tombé dans les livres. En écrire lui est vite apparu comme une évidence. En vivre, même modestement, comme un privilège. Les incarner physiquement, tel un artiste en performance, son devoir et son plaisir. Même s’il s’avoue "mort de peur". Jean-Claude Perrier

Sébastien Meier, Les casseurs d’os, Fleuve éditions, Prix : 19,90 euros, 304 p, sortie : 12 avril, ISBN : 978-2-265-11732-7

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