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Le ministère de la Culture était tellement pressé d’annoncer la bonne nouvelle qu’il a dégainé dès cette semaine un communiqué prenant de court les intéressés eux-mêmes : auteurs et éditeurs sont enfin parvenus à un accord sur un contrat d’édition adapté « à la nouvelle économie numérique du livre », s’est félicitée Aurélie Filippetti, qui avait mobilisé son administration sur le sujet depuis l’automne dernier. Lors d’une ultime réunion, le 28 février, le Conseil permanent des écrivains (CPE) a approuvé à l’unanimité la dernière version du texte discuté sous l’égide de Pierre Sirinelli, professeur de droit spécialiste de la propriété intellectuelle. Le Syndicat national de l’édition (SNE) a fait de même de son côté. Tous se retrouveront le 21 mars prochain pour une signature sous les dorures du ministère de la Culture, qui transposera cet accord en projet de loi, car il faudra modifier le Code de la propriété intellectuelle (CPI) pour le mettre en œuvre. L’accord prévoit des modifications du CPI et du Code des usages, qui prendra force réglementaire alors qu’il est simplement admis comme référence dans la jurisprudence aujourd’hui.
Les auteurs ont cédé sur le principe de réversibilité à l’origine de l’échec des discussions en juin dernier. Il aurait supposé qu’un défaut d’exploitation permanente et suivie de l’éditeur sur un seul des supports, numérique ou papier, entraînait la récupération de tous ses droits par l’auteur. Le contrat reste unique, avec deux parties, numérique et papier, bien distinctes : la fin d’exploitation sur un support n’aura donc pas forcément de conséquence sur l’autre. En échange, les auteurs ont obtenu des engagements précis sur la clause de réexamen, la reddition des comptes et la clause de fin d’exploitation.
Le réexamen du contrat est limité à la partie numérique, mais il est explicitement précisé qu’il portera sur les conditions économiques de la cession de droit. Il pourra intervenir quatre ans après la signature initiale, à la demande de l’auteur ou de l’éditeur. Au-delà, deux autres demandes de renégociation sont possibles. En cas de désaccord, une commission de conciliation pourra être saisie, qui n’aura qu’un avis consultatif.
Les redditions de comptes constituent un point de tension entre auteurs et éditeurs, que les enquêtes de la Scam (Société civile des auteurs multimédia) analysent depuis plusieurs années. L’éditeur devra fournir une reddition pour chaque titre, détaillant le nombre d’exemplaires vendus, fabriqués, en stock, pilonnés, avec les différents taux stipulés au contrat, et une partie spécifique consacrée au support numérique. Toutes ces informations pourront être accessibles via Internet et un espace dédié aux auteurs. Si ces obligations ne sont pas remplies, le contrat pourra être résilié de plein droit, trois mois après la mise en demeure de l’auteur.
La clause de fin d’exploitation prévoit que s’il n’y a strictement aucune vente, sous quelque forme que ce soit, pendant deux ans, l’auteur pourra reprendre ses droits à l’issu d’un préavis de trois mois. Ce qui reste une contrainte modérée pour l’éditeur, qui pourra toujours faire acheter un exemplaire numérique s’il tient à conserver un titre commercialement inactif dans son fonds. Hervé Hugueny
Lire la synthèse de l’accord sur Livreshebdo.fr.

