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Connectez-vous Pas encore abonné ? Abonnez-vousIsabelle Brue
il y a 5 ans à 11 h 53Pour tous ceux qui veulent vraiment s'évader durant cet été, je leur recommande la lecture du roman Les Enfants de Calliope de Cyane ! Le scénario est intelligent, et l'histoire carrément passionnante et pleine de surprise, et il est difficile de le lâcher avant la fin ! Voici le teaser pour ceux que ça peut intéresser ;-) Juliette est une adolescente ordinaire en dernière année de lycée ; elle s’intéresse aux garçons, sort avec ses copines, joue à la Wii, prend des photos avec son mobile, et elle adore écouter Rihanna, Britney Spears ou Coldplay sur son lecteur mp3. Nous sommes en 1985.
Claire Pluygers
il y a 5 ans à 08 h 34De quel amour blessée – Réflexions sur la langue française Alain BORER, Paris, Gallimard, 2014 (Collection Blanche) Je recommande vivement ce livre qui, tenant les promesses de son double titre, offre une défense aussi amoureuse que rigoureuse sur un thème dont l'urgence n'est hélas plus à démontrer. Vers quel destin (inexorable?) s'achemine notre langue française? Quelle est à présent sa situation? Comment préserver ce trésor accumulé par des siècles de réflexion et de création? Si le constat ne laisse pas d'inquiéter, le dynamisme et la beauté de l'écriture de cet essai stimulent en revanche, et nourrissent le désir d'œuvrer au maintien et à la renaissance, voire à l'efflorescence d'une des richesses de notre patrimoine universel. Auteur d'une œuvre diverse mais centrée sur des activités vitales qui toutes exigent un sens de la gratuité et de l'essentiel – l'art, le voyage, etc.,1 c'est en poète qu'Alain Borer aborde la situation délicate de la langue française dans le concert des nations. Et c'est en poète qu'il tire la sonnette d'alarme, attentif à ces signes annonciateurs qui, se produisant depuis plusieurs décennies, ne peuvent plus tromper. L'ouvrage nous expose les faits: comment, malmenée dans l'usage que nous en faisons mais surtout dans les mésusages qui sévissent de plus en plus, la langue française accuse indéniablement une régression. Par ailleurs, la nature ayant horreur du vide, à toute perte correspondra – correspond déjà – un comblement artificiel. Car cette régression de notre langue s'accompagne de l'envahissement en son sein même de parasites dont le nombre est à la mesure de leur automatisme. Corrélation ou contamination entre les deux phénomènes, les exemples abondent: abréviations, recours à des termes anglo-américains, création de néologismes douteux, constructions boiteuses ou inexistantes, réduction de nuances – lors même que la langue française possède et précise ces réalités dont il semble qu'on n'ait plus souvenance.2 Or, ce qui ne peut être dit bientôt ne pourra plus être conçu – (voire vécu?). L'appauvrissement de la langue signifiera bientôt un appauvrissement de l'expérience même. Ainsi donc, l'opération s'effectuant dans les deux sens, nous assistons à une déperdition, à un oubli – et ce dernier terme est lourd de tout ce qu'une pensée philosophique peut y entendre de hâte et d'inconscience. Ce diagnostic sans appel permet à Alain Borer, dans la partie peut-être la plus belle du livre, de brosser le tableau, riche en exemples, de quelques spécificités de la langue de Racine et de Molière (et de tant d'autres qui en ont fait la gloire), royaume d'acribie et de subtilité, domaine du parlécrit3, c'est-à-dire du réfléchi, mais aussi souci d'euphonie et, en un mot, de beauté. Citons, parmi d'autres, l'imparfait du subjonctif, la concordance des temps, la double négation, la présence du e muet, des accents (au contraire de l'accentuation qui, indice de mesure, d'équilibre, n'existe pas en français), toutes particularités que d'aucuns – la tendance actuelle ne le montre que trop – trouveront anodines, voire périmées, mais qui témoignent d'une conception originale dans le projet même de la langue, lequel, plutôt qu'affirmé de façon péremptoire par l'Auteur, est suggéré et commenté, ce qui peut susciter chez le lecteur approbation ou étonnement, en tout cas réflexion et éveil renouvelés, par une pratique en acte – en l'occurrence en réceptivité – de ce respect qui est une autre caractéristique de la grammaire française. L'on se demande alors: déclin sans appel, vraiment? La solution jaillirait-elle de cette diversité de locuteurs qu'a permise la langue française dans son essence même, qui est de ne pas provenir d'une terre, mais d'un esprit? « Où courir, où ne pas courir? », s'interroge avec alacrité l'Auteur. D'une écriture fouillée, d'un trait tout à la fois concis, enlevé et infiniment nuancé (encore un terme de tonalité spécifiquement française), De quel amour blessée éveille ainsi le désir d'approfondir notre langue, de la réapprendre et d'en jouir en l'écoutant et la « parlant bien ». Du reste, ce qui touche l'esprit et le cœur, ce qui nous empêche de désespérer tout en tremblant pour elle, la langue française, c'est cette question qu'Alain Borer n'a pas craint de lui adresser en plaçant en tête du titre de son essai cet hémistiche racinien: « de quel amour blessée »; cette question que l'on poserait à une amie, à une sœur, il la pose à la langue française – et nous connaissons la suite du vers de Racine, heureusement non dite ici. Puisse cette remémoration vive, en laquelle tient ce livre au fond, nous aider à prendre conscience du trésor qu'est réellement cette langue à nous confiée, à la (sauve)garder et la cultiver précieusement! Claire Pluygers Lectrice et latiniste