Premier roman traduit en français du diplomate allemand Stefan aus dem Siepen, La corde, situé dans des « contrées reculées » en un temps moyenâgeux où l’on mesure les distances en pas et chasse avec des flèches, où des hommes enchaînés à des rituels de survie séculaires manient la faux et la hache, interprète la musique inquiétante d’un conte germanique traditionnel, à la façon du Joueur de flûte de Hamelin.
C’est la fin de l’été, dans un hameau isolé d’une vingtaine de maisons cerné par une forêt « d’un noir bleuté » sans limites connues. Les moissons approchent. Un matin, un paysan découvre au sol une corde qui s’enfonce dans les bois et la suit sans parvenir à trouver son début. Le lendemain, quatre villageois partent en expédition mais reviennent à leur tour bredouilles. L’un d’eux est blessé lors d’une charge de sanglier. Tous les hommes décident alors d’organiser « le grand départ », et de pénétrer plus avant dans la forêt, laissant au village femmes, enfants et vieux. Mais tandis que deux d’entre eux rebroussent rapidement chemin, le reste du groupe ne peut résister à la tentation de découvrir ce qu’il y a au bout de la corde sans fin. Les jours de marche se transforment en semaines. L’instituteur, estropié, escorté de deux dogues, prend l’ascendant sur le groupe, encourageant ses compagnons de plus en plus envoûtés à poursuivre, sous la menace d’une meute de loups, une équipée de plus en plus insensée. Piégé par la curiosité et l’orgueil, personne ne peut plus faire demi-tour.
Parabole sur l’avidité, la pulsion dangereusement ambivalente de l’aventure, La corde installe un climat d’excitation et d’inconscience face à un inconnu magnétique, une tension de désir et de mort. Ça ne finira pas bien. V. R.