Justice

Troisième pourvoi en cassation annoncé pour "Complices de l'inavouable"

Patrick de Saint-Exupéry - Photo DR

Troisième pourvoi en cassation annoncé pour "Complices de l'inavouable"

Le livre publié aux Arènes de Patrick de Saint-Exupéry sur les origines du génocide du Rwanda fait l'objet de deux arrêts d'appel contradictoires et immédiatement contestés.

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Par Hervé Hugueny,
Créé le 01.06.2015 à 19h34

La réédition en 2009 par Les Arènes de Complices de l'inavouable - La France au Rwanda, de Patrick de Saint-Exupéry, compte deux décisions de justice de plus, prononcées le 27 mai par la cour d'appel de Lyon. Elles s'ajoutent aux quelque 25 jugements et arrêts déjà rendus, et ne mettront pas fin pour autant à une procédure hors normes.
 
Pour la quatrième fois le général Jean-Claude Lafourcade, commandant en chef de l'opération Turquoise au Rwanda en 1994, s'est de nouveau trouvé débouté de sa plainte en diffamation déposée en 2009, alors que le général Eric de Stabenrath a obtenu gain de cause pour sa plainte reposant sur le même motif, mais déposée séparément. L'auteur, Patrick de Saint-Exupéry, et l'éditeur, les Arènes, sont condamnés à 3 000 euros de dommages et intérêts, et le nom du plaignant devra être retiré de la couverture de l'ouvrage, en cas de réédition.

Un pourvoi en cassation

Vincent Tolédano, avocat des Arènes et de Patrick de Saint-Exupéry, annonce qu'il déposera un pourvoi en cassation contre cette décision, tandis que Pierre-Olivier Lambert, qui défend les deux officiers supérieurs, fera de même contre l'arrêt défavorable à Jean-Claude Lafourcade.
 
Le différend concerne la couverture de la réédition de l'ouvrage qui retrace la "politique secrète qui fut menée par Paris au Rwanda de 1990 à 1994" et qui a abouti "au dernier génocide du XXe siècle". Trente-cinq noms de personnalités diverses constituent le fond de cette couverture et entourent le titre, laissant entendre qu'elles sont "Complices de l'inavouable", lequel n'est pas la tragédie elle-même mais la politique qui y a conduit.

La source média référencée est manquante et doit être réintégrée.


Dans ses deux arrêts rendus le 27 mai, la cour de Lyon considère que cette juxtaposition est bien diffamatoire, mais elle juge dans le cas du général Lafourcade que ses "responsabilités de commandant en chef de l'opération Turquoise et sa manière de les assumer, les prises de position dans le cadre de l'association France Turquoise dont il est le président, doivent dans le cadre d'un débat d'intérêt général pouvoir être questionnées plus librement dans un sens conforme aux exigences de la liberté d'expression". A l'appui de son analyse, l'auteur relate bien des "éléments factuels précis, mettant en cause Jean-Claude Lafourcade en tant que commandant en chef de l'opération Turquoise".
 
Ces éléments factuels font partie des quatre critères, avec la poursuite d'un but légitime (en l'occurrence informer le public sur un événement dramatique), l'absence d'animosité personnelle et la prudence dans l'expression, qui permettent de juger qu'un auteur est de bonne foi, et donc non condamnable, même si ses propos sont diffamatoires.
 
Des éléments factuels insuffisants

En revanche ces éléments factuels ont été jugés insuffisants dans le cas d'Eric de Stabenrath dont "le rôle n'est pas du tout explicité dans le livre, tant en ce qui concerne son action lors de l'opération Turquoise, que lors des débats ultérieurs". Son nom est mentionné dans une note de bas de page, et les éléments relevés dans ce "paragraphe sont nettement insuffisants pour permettre la mise en cause sous la dénomination de complice de l'inavouable", tranche la cour d'appel.
 
Deux autres dossiers sont en attente d'une décision à la cour de cassation, dans des états d'avancement différent : l'un en est à son premier pourvoi et l'autre en est au troisième, comme les deux affaires tout juste examinées à Lyon, et qui vont aussi revenir pour la troisième fois en cassation.

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