Histoire/GB 7 novembre Antony Beevor

Cela ne devait être qu'une formalité sur la route de Berlin. Ce fut un désastre. Cette ville des Pays-Bas prise par les Allemands en 1940 apparaissait comme un verrou facile à faire sauter pour les Alliés. Sur la carte, il s'agissait de contourner la ligne Siegfried et de foncer vers la Ruhr, dans le cœur industriel du Reich. Pour cela il fallait faire passer les blindés de l'autre côté du Rhin, à Arnhem.

Le maréchal britannique Montgomery sent la victoire à portée de main. Les généraux américains Patton et Bradley doutent de la facilité de cette vaste opération aéroportée nommée Market Garden. Quant au major Sosabowski, chargé de prendre avec ses parachutistes polonais le pont de Nimègue sur les hauteurs d'Arnhem, il prévient : « Croyez-moi, ce sera un bain de sang. »

En effet, dès les premières heures, rien ne se passe comme prévu. Le commandement britannique a sous-estimé la force de frappe allemande de l'armée du Generalfeldmarschall Model. Le plan était mauvais, les événements vont donc se dérouler selon une terrible logique.

C'est du pain béni pour Antony Beevor qui sait raconter au point d'immerger le lecteur dans l'événement. Point n'est besoin d'user du romanesque pour cela. Tous les faits sont avérés, rien n'est inventé, aucune lacune n'est comblée. Après les succès chez Calmann-Lévy de D-Day et la bataille de Normandie (2009), La Seconde Guerre mondiale (2012) et Ardennes 1944 : le va-tout de Hitler (2015), l'historien britannique révèle dans Arnhem de nouveaux témoignages, explore des archives inédites, reprend le dossier et redistribue les cartes d'une partie très compliquée et surtout mal engagée.

Le 17 septembre 1944, les parachutistes sont hissés avec peine dans les avions. Ils portent l'équivalent de leur propre poids en matériel. Leur mobilité réduite une fois au sol en fait des cibles faciles pour la Wehrmacht. Parmi les 300 planeurs britanniques, certains s'écrasent dans les champs. Les Alliés finissent par être bloqués dans Arnhem. Les ponts demeurent infranchissables et la puissance de feu des Panzerdivision se montre redoutable.

« Avec les accrochages sur le pont, l'encerclement des formations britanniques près du centre et l'affrontement majeur qui se développe à l'ouest de l'hôpital Sainte-Elisabeth, Arnhem est en train de devenir un véritable champ de bataille. » Jusqu'au 20 septembre, la ville néerlandaise devient un enfer, pour les soldats comme pour la population. Les Polonais de Sosabowski ont été sacrifiés. Arnhem est vidée de ses habitants par les Allemands, pillée, et les civils résistants sont fusillés. L'opération est un échec complet : près de 17 000 tués, blessés ou prisonniers dont 12 000 parachutistes pour les Alliés, autour de 8 000 du côté allemand. Arnhem ne sera libérée qu'en avril 1945. Montgomery considéra pourtant que Market Garden avait réussi à 90 % ! Aux Pays-Bas, le fait de mal envisager un objectif se traduit par une expression directement tirée de cette bataille : enn brug te ver, un pont trop loin.

Antony Beevor
Arnhem : la dernière victoire allemande - Traduit de l’anglais par Guillaume Marlière
Calmann-Lévy
Tirage: 15 000 ex.
Prix: 26,50 euros ; 720 p.
ISBN: 9782702163580

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