Eliane Calmann-Lévy prend ses distances avec Hachette Livre. Actionnaire des éditions Calmann-Lévy qui appartiennent à Hachette Livre depuis 1993, cette héritière des frères fondateurs Michel et Calmann-Lévy a déclaré dans les colonnes du Monde que « la désormais coloration de droite nationaliste et le tropisme prorusse, avec notamment la présence au Journal du dimanche de Xenia Fedorova, propagandiste de Poutine, mettent très mal à l’aise la majorité des 66 000 collaborateurs de Vivendi-Lagardère et de Louis Hachette Group, de nombreux auteurs, sans compter des partenaires commerciaux et des actionnaires ».
L’actionnaire, qui détient 16 % de Calmann-Lévy avec ses deux cousins, les frères Nicholas et Alexandre Oulman, estime que, si Arnaud Lagardère, P-DG de Lagardère et d’Hachette Livre, avait su se montrer « équilibré sur le plan politique avant l’ère Bolloré », il ne l’est plus depuis son rachat par le groupe Vivendi (via Lagardère).
Afin d’« apaiser une situation crispante et improductive, tout en permettant la libre expression », elle a déclaré au quotidien du soir que « la meilleure solution serait de revendre Fayard, Le JDD et Europe 1 au groupe Bolloré et de permettre ainsi à Louis Hachette Group de renouer avec une réelle neutralité politique bienvenue et attendue ».
« Perte de valeur »
Eliane Calmann-Lévy assure que « l’immixtion de la politique dans l’économie est, à terme, constitutive de perte de valeur » alors même que l’essentiel des 3 milliards d’euros de chiffre d’affaires de la branche livre de Louis Hachette Group provient de la littérature. « Le cumul des ventes de livres de Jordan Bardella, Nicolas Sarkozy, Philippe de Villiers et Xenia Fedorova, chez Fayard, est équivalent à la vente d’un seul livre de Guillaume Musso chez Calmann-Lévy », affirme-t-elle.
La prise de parole d’Eliane Calmann-Lévy intervient alors que la Commission européenne a récemment affirmé que Vivendi n’a pas respecté les règles de l’UE en matière de concurrence en prenant « trop tôt » le contrôle du groupe Lagardère. « Si ces accusations sont confirmées et que Vivendi est condamné à une amende – qui peut aller jusqu’à 10 % de son chiffre d’affaires mondial –, les petits actionnaires seront à nouveau pénalisés, déplorent les actionnaires familiaux », relève Le Monde.
Également cité par le quotidien, Arnaud Lagardère a réagi aux déclarations d’Eliane Calmann-Lévy : « On ne peut pas à la fois se déclarer en faveur de la liberté d’expression – ce qui est dans l’ADN d’Hachette Livre – et prôner la censure ou le rejet de telle ou telle expression. »
« Je suis fier de tous nos auteurs quelle que soit leur pensée et je tiens personnellement à leur exprimer tout mon soutien. Fayard, Europe 1 et Le JDD sont partie intégrante du groupe Lagardère, ils doivent y rester : leur succès d’audience montre d’ailleurs bien qu’ils ont un rôle à jouer dans la société française », a-t-il poursuivi.