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L’association Cartooning for peace, créée par Plantu, vient de publier chez Actes Sud un épais volume collectif intitulé Caricaturistes, fantassins de la démocratie, déclinaison du documentaire présenté au dernier Festival de Cannes.
        
La caricature « de presse » n'a jamais bénéficié que d'une tolérance de la part des juridictions. Il existe bien dans le Code de la propriété intellectuelle (CPI) une exception de « parodie, pastiche et caricature ». Mais elle ne concerne que la déformation ou l'imitation d'une œuvre protégée par le droit d'auteur et ne s'applique en rien aux dessins féroces ou aux montages hâtifs et trompeurs brocardant des individus plus ou moins célèbres.
        
La jurisprudence a d'ailleurs des occasions régulières de rappeler qu'aucun texte n'exonère de leur responsabilité les éditeurs qui abusent de cette simple tolérance. Un livre à fort tirage, intitulé Comme des bêtes, est à l'origine d'un arrêt de la Cour de cassation, rendu le 13 janvier 1998. L'éditeur avait en effet concédé certains droits dérivés à une société qui avait commercialisé des épinglettes, c'est-à-dire des pin's, à partir des caricatures publiées. La juridiction suprême a estimé que Christophe Dechavanne pouvait légitimement s'opposer à un tel marchandisage. 
     
Cette affaire n'est pas sans rappeler celle qu'avait déjà jugée, avec retentissement, le Tribunal de grande instance de Nancy, en 1976 : Giscard d'Estaing poursuivait le fabricant de la « Giscarte », jeu de 52 cartes représentant le Président de la République d'alors sous le déguisement des plus célèbres personnages de l'Histoire de France, à la suite de la commercialisation en librairie d’un ouvrage intitulé Giscaricature.

Quant à l’article L.122-5 du CPI, il précise bel et bien que « lorsque l'oeuvre a été divulguée, l'auteur ne peut interdire : (...) la parodie, le pastiche et la caricature, compte tenu des lois du genre ». Mais l’examen de la jurisprudence permet de recenser essentiellement deux « lois du genre » particulièrement draconiennes.
        
La parodie se doit en premier lieu d’être exempte de toute intention de nuire. Il s’agit là d’un exercice difficile, si ce n’est absurde, quand le ressort même de ce type d’humour repose sur un certain degré de méchanceté. Tintin en Suisse l’avait par exemple appris à ses dépens il y a déjà quelques années.

Le lecteur doit par surcroît pouvoir identifier la parodie en tant que telle et donc être en mesure de la distinguer instantanément de l’œuvre première. Aucune possibilité de confusion dans l’esprit du public n’est tolérée. Le risque de confusion s’appréciant toujours par rapport à un consommateur moyen, il ne faut donc pas considérer que des différences, grossières aux yeux de professionnels du livre, puissent exclure une condamnation. En quelques vingt années, une poignée de procès retentissants ont mis au pas les trublions du monde de l’édition. Ils ont appris à leurs dépens que les parodies de best-sellers ou de collections célèbres figurent désormais en bonne place au rang des quelques livres interdits en France chaque année.

Il faut toutefois relever que, le 11 février 2011, la Cour d’appel de Paris s’est enfin prononcée en faveur de l’exception de parodie et de Gordon Zola qui s’était attaqué lui-aussi à l’oeuvre d’Hergé. 
 

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