Approuvée avec quelques modifications le 8 janvier au Sénat, la proposition de loi sur les frais de port reviendra en seconde lecture à l’Assemblée nationale, d’ici à la fin février, espère la ministre de la Culture (voir p. 18). Le texte stipule que les revendeurs sur Internet devront établir un prix de livraison, éventuellement diminué de l’équivalent de la remise de 5 %, qui ne pourra plus être imputée sur le prix du livre dans la vente à distance. Si elle est votée dans les mêmes termes, la loi sera promulguée dans les quinze jours suivants, et entrera en vigueur trois mois plus tard. Un délai ajouté par amendement au Sénat, « qui n’était pas demandé par le SLF », insiste Guillaume Husson, secrétaire général du syndicat des libraires. Il s’agit de laisser aux revendeurs le temps d’adapter leurs systèmes et d’intégrer les coûts afférents, a expliqué Jacques Legendre, le sénateur qui a défendu cette mesure, notamment à la demande de la Fnac.
Les libraires sont plutôt impatients de voir cette loi entrer en vigueur. « C’est une très bonne nouvelle, ça clarifie les choses. Il n’y aura plus ces prix barrés sur Amazon, qui donnaient l’impression que les livres sont moins chers sur Internet. Désormais, ce sera moins cher de venir en librairie », se félicite Marion Le Goascoz, directrice de Dialogues. La librairie brestoise propose cette réduction de 5 % sous forme de bons d’achat à ses 42 000 adhérents à sa carte de fidélité. «Un élément important dans la relation avec nos clients, et sur lequel nous communiquerons d’autant plus maintenant », insiste la directrice.
« Lorsque ce sera voté, nous pourrons faire aussi une carte de fidélité », envisage à l’unisson Joël Gattefossé, fondateur du Bleuet (Alpes-de-Haute-Provence), librairie citée en exemple au Sénat. Le gérant de cette grande librairie est impatient de remonter sa marge sur son site Internet, récemment ouvert et aligné sur le rabais d’Amazon. Il veut aussi réduire la charge des frais de port, offerts à partir de 38 euros d’achat. «Mais ce n’est pas gratuit pour nous : en décembre, la facture de La Poste a atteint 3 428 euros après remise, pour 700 colis», détaille-t-il. Comme d’autres libraires, il s’interroge sur le calcul de la nouvelle grille de ces frais, qu’il pourra réduire à concurrence de 5 % du montant de la commande.
Une question aussi pour Florent Moure, responsable d’Odisseum et de Sauramps.com à Montpellier, qui se demande si les libraires devront justifier leur grille sur leur prix de revient : « En fonction de notre volume, La Poste nous accorde 20 % de remise. Mais Amazon bénéfice de conditions bien plus favorables. » Les ventes de Sauramps.com ont progressé de 20 % l’an dernier, mais son responsable prévoit plus de retraits en magasin, « déjà très utilisés ». Ce sera en effet le seul moyen de bénéficier du rabais de 5 % pour les clients, et sans doute d’augmenter le nombre de cartes de fidélité (35 000 porteurs). Hervé Hugueny

