Il ne décolle toujours pas. Il y a encore peu le livre numérique suscitait autant de folles espérances que de grandes craintes pour le secteur de l'édition. Or, sa part de marché stagne, voire baisse dans les pays anglo-saxons. On constate
l'exception frappante du marché allemand. En France,
la croissance reste aussi au rendez-vous avec 13,2 millions de livres numériques vendus en 2017 et un nombre d'acheteurs en progression.
Cependant les liseuses se vendent moins (les ventes de Kindle ont été divisées par trois en cinq ans). Pas étonnant que
les patrons des grands éditeurs américains célèbrent le retour du livre imprimé à BookExpo America. Aux Etats-Unis,
les ventes de ebooks ont chuté de 22% en 2017!
"Le temps du fantasme, nouvel âge d’or ou au contraire apocalypse sur la chaîne traditionnelle du livre, est passé", résume
Sébastien Célimon, qui dresse
un état des lieux du livre numérique en France, paru le 16 mars aux éditions du Cercle de la librairie.
Lors des récentes Assises du livre numérique, tous observaient que
l'édition tient bon et l'imprimé résiste plus que bien. Ce qui ne l'empêche pas
d'être innovante, avec des écritures interactives, des applications collaboratives ou des diffusions connectées, ou encore des livres
en réalité augmentée. Le livre et la littérature numérique restent une priorité stratégique,
l'Institut français consacrant même un site consacré aux innovations en la matière.
On s'interroge sur ce marché qui reste méconnu voire opaque en chiffres.
Dans un baromètre, le consultant Rüdiger Wischenbart démontre que la sensibilité au prix est primodiale pour le consommateur, persuadé que le ebook doit être moins cher que le livre imprimé. Cette année, l'Europe a finalement autorisé
l'application du taux réduit de TVA sur les livres numériques.
La dernière étude Global Web Index sur la lecture numérique montrait que le e-lecteur était surtout une femme de moins de 45 ans et instruite, fan de fictions de genre. Dans
son palmarès des meilleures ventes, la plateforme Kobo constate en effet les bonnes performances de la littérature grand public (Joël Dicker, Marc Lévy, Guillaume Musso, ...). Pas étonnant que la filiale de Rakuten ait signé
un partenariat exclusif avec Julie de Lestrange. Ou que
Samantha Bailly s'engage avec Amazon pour son premier livre numérique.
Streaming, ebook, livres audio, réseaux sociaux, contenus sur smartphones : le marché de la lecture numérique se stabilise, mieux structuré et plus créatif, comme on l'expliquait dans notre
dossier dédié aux lectures numériques en octobre. C'est nécessaire car la concurrence n'est pas seulement celle des des supports. La véritable inquiétude est le temps disponible pour lire face aux autres loisirs (cinéma, séries, jeux vidéos) ou aux nouvelles formes de narration (réseaux sociaux, livre audio...).
Le P-DG de Rakuten Kobo, Michael Tamblyn, rappelait d'ailleurs
dans un entretien à Livres Hebdo en novembre: "
Nos vrais concurrents, ce ne sont finalement pas Amazon, l'iBookstore d'Apple ou Google Livres, mais plutôt Netflix, YouTube, Facebook, Instagram et toutes ces sociétés qui investissent des milliards de dollars pour s'emparer de notre temps de loisir".