Entretien

Sylvie Robert : « La loi Bibliothèques n’est qu’une étape »

Sylvie Robert, autrice de la loi sur les bibliothèques et le développement de la lecture publique. - Photo DR

Sylvie Robert : « La loi Bibliothèques n’est qu’une étape »

Le 16 décembre, le Sénat a adopté la proposition de loi relative aux bibliothèques et au développement de la lecture publique. Gratuité, pluralité, prochains chantiers… Entretien avec Sylvie Robert, la sénatrice à son initiative.

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Par Fanny Guyomard,
Créé le 17.12.2021 à 13h00

Après des mois de mise au point parlementaire, le Sénat a mis ce 16 décembre un point final à la proposition de loi relative aux bibliothèques et au développement de la lecture publique, qui définit les missions des biblitothèques publiques territoriales. Une première étape de franchie, pour sa rapporteuse et auteure Sylvie Robert, membre de la Commission de la culture, de l'éducation et de la communication. 

Satisfaite du vote de la Loi au Sénat ?
Oui ! Pour une parlementaire, c’est gratifiant d’avoir sa loi, c’est le cœur de nos missions. Cette loi consacre pour la première fois les bibliothèques, un lieu de vie et de sociabilité, le premier équipement culturel de France : 16 000 bibliothèques, c’est inégalé par rapport aux autres équipements. Et à souligner que cette proposition de loi est complémentaire à celle de Laure Darcos sur l’économie du livre [qui prévoit notamment d’instaurer un barème de livraison minimum pour les achats de livres en ligne]. L’ensemble des acteurs de la chaîne doit être solidaire : quand il y a une bibliothèque dans une ville, c’est important qu’il s’y trouve aussi une librairie indépendante.

Qu’est-ce qui vous a décidée à proposer ce texte ?
C’est l’aboutissement d’une réflexion que je mène depuis plusieurs années. Les archives et les musées ont leur loi, mais pas les bibliothèques, ce qui était un manque étonnant ! La loi donne maintenant la définition d’une bibliothèque, ses missions et trois grands principes : la gratuité, la liberté d’accès et le caractère pluraliste des collections. Ce qui permet de les protéger des dérives comme celles qui avaient eu lieu à Vitrolles [en 1997], quand la collectivité était passée sous Front national [et filtrait les documents de la bibliothèque]. Autre exemple : cette loi interdit désormais aux départements de supprimer leur BDP !

Revenons à la « liberté d’accès », consacrée par l’article premier. Est-ce en contradiction avec le passe sanitaire demandé à l’entrée des bibliothèques publiques territoriales ?
Une loi est un texte qui vaut pour plusieurs années. Le passe sanitaire n’entre pas en contradiction car c’est un outil qui j’espère va s’arrêter un jour, lié à un contexte particulier !

L’article 5 demande lui une diversité dans les collections, « exemptes de toutes formes de censure idéologique » : les bibliothécaires doivent-ils donc acquérir des ouvrages polémiques, comme Les Carnets noirs de Gabriel Matzneff, pour n’en citer qu’un ? 
Je fais confiance aux responsables des bibliothèques car ils ont la compétence pour construire une politique documentaire. La loi demande le principe de la pluralité et c’est ensuite aux professionnels de trouver l’équilibre, au cas par cas.
La pluralité, c’est aussi prendre en compte les spécificités d’un territoire et proposer des documents en breton si l’on est en Bretagne.

Que va-t-il se passer ensuite ?
Les décrets et arrêtés sont déjà en préparation. Mais cette loi n’est qu’une étape : il y aura d’autres dispositions à faire passer dans les prochaines années sur les horaires d’ouverture, la formation des bibliothécaires à l’évolution des médiathèques... Je vais aussi me tourner vers l’Outre-mer, où il y a, à certains endroits, un déficit de politique de lecture publique. Et continuer à travailler sur la question du numérique : les licences, l’accès, le prêt, les accords auteurs-éditeurs-bibliothèques... C’est un gros chantier.
 

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